Kant va essayer de démontrer par l'absurde la véracité de sa proposition (l'Esthétique transcendantale comprend les deux formes a priori de la sensibilité, l'espace et le temps).
Pour cela il suppose que l'espace et le temps sont objectifs en eux-mêmes et sont les conditions de possibilité des choses en soi. Cette hypothèse n'empêche pas qu'il continue d'exister des propositions apodictiques et synthétiques a priori notamment à propos de l'espace (il va se concentrer sur l'espace avec les connaissances a priori relatives à la géométrie).
D'où tire-t-on de telles propositions, de telles connaissances? Elles ne peuvent provenir que de concepts (entendement) ou d'intuitions donnés soit a priori soit a posteriori.
Elles ne peuvent pas être a posteriori car, par cette voie-là, il n'existe aucune connaissance apodictique (une expérience ne donne aucune certitude en soi pour tout autre expérience).
Elles sont donc a priori.
S'agit-il de concepts a priori? Prenons l'exemple du concept de trois lignes droites. Conceptuellement il est impossible de construire une figure avec ce concept (il ne faut surtout pas s'imaginer les trois lignes droites! car dans l'imagination nous faisons intervenir l'espace, nous n'en restons donc plus au seul concept des lignes droites). La voie purement conceptuelle ne permet pas de construire une figure.
Il ne reste plus que l'intuition a priori.
Nous devons donc fournir notre objet (un triangle, figure formée par les trois droites) a priori dans l'intuition et fonder sur lui notre proposition synthétique.
Il faut donc que réside en nous un pouvoir d'intuitionner a priori, et comme l'objet alors donné dans l'intuition a une spatialité il faut que cette forme (l'espace) soit la condition universelle a priori sous laquelle l'objet est saisi. Si l'objet (le triangle) était quelque chose en soi, sans aucun rapport avec notre subjectivité, nous ne pourrions absolument rien ajouter à la figure de triangle que ce qui appartient aux trois droites, puisque la figure nous est donnée avant toute connaissance du triangle. Nous ne pourrions absolument pas construire une connaissance synthétique, nous ne pourrions rien ajouter au triangle, qui puisse nous assurer que ces ajouts ont un rapport avec l'objet en soi (en quoi l'objet intuitionné, créé, pourrait être identifié avec l'objet en soi?).
Il est donc certain que l'espace (et le temps) sont les conditions subjectives de notre intuition eu égard auxquelles tous les objets sont de simples phénomènes et non ces choses en soi.