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Critique de la raison pure

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descriptionCritique de la raison pure - Page 26 EmptyRe: Critique de la raison pure

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Je reviens sur ces concepts (au sens kantien, c'est-à-dire dans un sens très général d'objets de la pensée) que le philosophe vient d'introduire : logique générale  et logique transcendantale.

Bien comprendre ces concepts est absolument nécessaire sinon il est impossible de comprendre les développements philosophiques qui vont suivre. Je m'appuie en partie pour expliciter ces concepts sur une étude publiée sur l'internet (accessible donc à tous) "Logique formelle, logique transcendantale" d'Alain Chauve, Philopsis, revue numérique.

Qu'est ce que la logique générale, que nous requalifierons ci-dessous en logique formelle (même sens)?

Citons Kant lui-même dans son traité :  Logique (traduction Guillermit, éditions Vrin, 1966) :

La logique formelle se définit comme "la science des lois nécessaires et universelles de la pensée en général" (page 12), elle "repose sur des principes a priori qui permettent de déduire et de démontrer toutes les règles" (page 13), ou encore, page 12 : "en logique il s'agit non de la façon dont nous pensons mais de la façon dont nous devons penser". Cette dernière assertion ne vaut que si nous nous plaçons dans le cadre de la logique générale (ou formelle) pure telle que définie plus haut (page 145 de la Critique), c'est-à-dire dans le cadre d'une logique qui n'a affaire qu'à la simple forme de la pensée (indépendamment de tout contenu) et qui est expurgée de toute donnée empirique. Rien n'empêche en effet, et nous avons tous des relations affectives avec nos proches- et moins proches - que la logique de l'entendement (logique appliquée selon la définition de Kant page 145), plongé dans les sentiments, "raisonne" tout autrement que selon les règles ici définies! Kant définit-là, dans la logique formelle pure, une logique objective, c'est-à-dire une logique qui est universelle, c'est-à-dire considérée comme vraie par l'ensemble des sujets humains, vraie au sens : "nous reconnaissons tous ces règles comme des règles de fonctionnement acceptables et acceptées dans un cadre donné, celui de la logique formelle pure". Je répète, nous pouvons affirmer d'autres cadres de référence dans lesquelles ces règles ne valent plus, notamment dans le cadre des rapports humains dans leur dimension affective par exemple.
Quelques exemples de principes fondateurs de cette logique formelle (principes ici signifie lois-cadres, mais lois-cadres données a priori) :
Principe de contradiction (ou de non-contradiction) : une chose ne peut pas à la fois être et ne pas être
Principe d'identité : A est A (toutes choses égales par ailleurs)
Principe du tiers exclu : la disjonction p ou non-p est vraie quelque que soit p (p est une proposition donnée, un jugement) [ici c'est le connecteur "ou" qui donne la compréhension du principe]
Mais nous avons aussi des règles qui portent non sur la forme des propositions (des jugements) mais aussi sur les formes du raisonnement, comme le syllogisme, où sont enchainées des propositions (des jugements) puis une conclusion. Nous pouvons donner un contenu au syllogisme mais nous pouvons aussi le vider de toute connaissance, de tout contenu, pour ne retenir que sa structure formelle, dans le cadre donc de la logique formelle pure.

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Qu'est ce que la logique transcendantale?


Nous allons anticiper sur les développements à venir afin de préparer la compréhension des textes.

La logique transcendantale est la science de l'entendement construite à partir des concepts purs (catégories). 

Mais qu'est-ce qu'un concept pur?


Reprenons l'exemple de la table particulière à partir de laquelle nous avons construit le concept empirique de la table en général. Le concept empirique de la table est l'ensemble des tables regroupées dans leur totalité à sortir de la définition de la table, définition qui reprend les éléments communs à toutes les tables. Il y a là un regroupement de toutes les tables sous un même concept empirique, il y a constitution d'une classe d'objets (classe comportant la totalité des objets considérés). C'est ce concept de classe, de totalité qui est un concept pur, c'est-à-dire qu'il faut qu'existe grâce à l'action de l'entendement ce concept pur pour que pratiquement nous ayons cette démarche de constituer l'ensemble des tables sous un même concept empirique (la table en général). Bien entendu, quand nous voyons une table nous ne voyons pas la totalité dont elle fait partie, ce concept pur nous n'en avons pas conscience, mais il est néanmoins un produit de l'entendement.


Continuons avec Hegel, Science de la Logique, page 166 (traduction Bernard Bourgeois, édition Vrin, 1970) : "Dans toute proposition de contenu entièrement sensible comme : cette feuille est verte, se sont déjà immiscées des catégories [concepts purs] : l'être, la singularité" Mais on pourrait ajouter  : la substance et la qualité. L'être pour le fait d'être de la feuille, (la feuille est), la singularité : "cette" feuille, la substance : la permanence de l'être "feuille" dans le temps, la qualité : la couleur. Ces concepts purs sont des pensées pures, dont nous n'avons pourtant pas conscience quand nous regardons la feuille (nous avons conscience qu'elle est verte mais nous ne prenons pas conscience que c'est une qualité, du moins pas sur le champ).

Dans la réalité donc nous ne prenons pas en considération les concepts purs, ce sont uniquement les objets qui attirent notre attention. 

Ce que se propose de faire la logique transcendantale c'est de prendre en considération les concepts purs et de les étudier dans leurs définitions et leurs applications.

Dernière édition par Vangelis le Ven 29 Avr 2016 - 3:08, édité 1 fois (Raison : Mise en forme.)

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La logique transcendantale est donc une logique formelle pure, qui, munie des concepts purs (munie donc d'un contenu) a le pouvoir de se rapporter a priori à des objets. Question : comment la logique transcendantale peut avoir un tel pouvoir puisqu'elle reste une forme vide? Comment sans introduire rien d'empirique, la pensée pure (munie donc d'abord de la logique formelle pure puis des concepts purs) réduite à une pure forme de la pensée peut elle avoir, ou plutôt se rapporter à un objet?

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Avant de répondre à la précédente question voyons comment s'exerce la pensée au quotidien. Elle se manifeste notamment dans le discours que nous tenons sur la réalité. La logique formelle est la syntaxe de ce discours en cela qu'elle détermine la forme des jugements  ainsi que les formes et les modes d'enchaînement de ces jugements (un jugement est à rapprocher d'un syntagme c'est-à-dire un groupe de mots formant une unité dans la phrase; ici il s'agit de l'association déjà vue : sujet, verbe, prédicat).

Mais en vérité cette syntaxe est gouvernée par les concepts a priori  (catégories) qui commandent  les types possibles de jugement (un peu comme un épée, d'abord construite en tant que telle, est ensuite utilisée dans différentes modalités). Citons Victor Cousin dans ses leçons en 1820 (citation rapportée par M. Chauve] : "Par rapport à la quantité les jugements sont individuels, pluriels ou généraux. Ces jugements seraient-il possibles sans les concepts de l'unité, de la pluralité, de la totalité ? Il y a loin de la simple représentation des éléments divers des choses à la conception qu'il y a un lien entre eux lequel forme une totalité ou une pluralité ou une unité. Il faut pour expliquer cette conception admettre que nous possédons a priori les concepts purs de la totalité, de la pluralité et de l'unité".

Illustrons cette citation par un exemple. Lorsque nous disons d'un morceau de sucre qu'il est est dur, blanc, doux, etc. nous disons alors que toutes ces propriétés sont réunies en un seul objet, mais cette unité n'est pas dans la sensation, elle n'est pas consciente. Il s'agit d'un jugement réunissant une quantité (l'énumération des qualités) en un seul objet, donc il faut qu'il existe dans l'entendement le concept pur d'unité, pour réaliser ce lien du divers en une unité.

Ainsi des notions et des significations pures, des concepts purs,  gouvernent ou plutôt "emplissent" de contenu les formes de la syntaxe de la logique formelle, un peu comme la signification des mots donne du contenu au discours tout en respectant la syntaxe pure du discours (sauf qu'ici la dite signification n'est pas donnée par l'expérience, mais qu'elle existe a priori, comme une synthèse, une opération de l'esprit, le schème, à voir plus tard dans les développements à venir).

Ces concepts purs peuvent-ils nous faire concevoir et exprimer autre chose que des formes logiques vides?  Nous revenons à notre question d'origine. La réponse selon Kant est : oui.

descriptionCritique de la raison pure - Page 26 EmptyRe: Critique de la raison pure

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Prenons l'exemple de la substance. C'est un concept pur. (La substance n'est pas perçue lorsque nous regardons un objet, elle peut être conçue mais non perçue).
La substance est le sujet dernier d'une attribution, c'est-à-dire un sujet logique qui est le dernier attribut possible. Il n'est pas possible de lui affecter un attribut. Cela signifie que la substance est le premier sujet attributif (le premier attribut), à partir  duquel nous pouvons décliner tous les autres. Dans l'arbre de Porphyre la substance tient le haut de la chaîne, c'est en quelque sorte l'être ou la réalité qu'il n'est plus possible de remonter, qui est le premier maillon, le premier point d'accroche de toutes les autres déclinaisons. C'est le sujet premier attributif, qui ne peut pas lui-même être prédiqué.

Il s'agit-là d'une construction purement logique, d'une forme vide d'une construction logique. Nous posons que la substance, logiquement, est le sujet dernier d'une attribution.  Ce sujet dernier n'a donc aucune validité empirique. Comment ce concept peut-il alors avoir une validité objective, c'est-à-dire se rapporter à un objet  et non pas seulement à un sujet logique ?

Kant fait correspondre à ce concept pur une représentation, celle d'une permanence obéissant au principe de conservation d'une "réalité" dans le changement (la substance est ce qui reste identique à soi dans le changement). Cette représentation de la permanence est due à la façon qu'a l'imagination pure d'appréhender, dans l'intuition pure du temps, des successions, des simultanéités, des durées et donc la permanence (durée). En cela la permanence n'est pas une image empirique des choses qui subsistent dans l'expérience, elle est une activité de la pensée, un schème, qui conçoit la permanence dans la forme pure de l'intuition qu'est le temps. Ensuite c'est cette représentation pure de la permanence est reliée au principe de la conservation d'une "réalité" dans les changements : le lien avec l'objet est ainsi réalisé.

Pour Kant les concepts purs commandent non seulement des formes logiques mais aussi des représentations. Il trouve dans la sphère des représentations intuitives pures, dans les formes de l'espace et du temps, les objets qui correspondent aux concepts purs : des successions, des suites, des séries, des simultanéités , des positions, des dimensions, etc. Les représentations de ces objets ne sont pas des images concrètes et empiriques mais nous avons bien affaire à des procédés de l'imagination pure qui forment des représentations.

Toutes ces notions seront reprises au fur et à mesure de la découverte du texte de Kant mais il était plus prudent de faire une petite synthèse préalable de ces notions pour parvenir à comprendre ensuite le texte de Kant.

Dernière édition par Vangelis le Ven 29 Avr 2016 - 3:15, édité 1 fois (Raison : Modification de la définition de la substance.)
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