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La théorie sur la conscience de Dehaene en question

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descriptionLa théorie sur la conscience de Dehaene en question - Page 30 EmptyRe: La théorie sur la conscience de Dehaene en question

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Bonjour Zeugme.

Après quelques temps d'absence itinérante, je reviens vers vous afin, comme je vous l'avais promis, de répondre à votre très intéressante réflexion sur le devenir humain. Plus particulièrement, je considère ce passage-ci :

ainsi la φύσις humaine me semblait, d'après les leçons d'Aristote, plus tournée vers l'amitié et la contemplation que vers la performation de son "facere" fût-il motivé par les qualités du "vivre ensemble" que nous défendons comme : la justice distributive et commutative, la paix, mais aussi la pérennité de l'espèce etc

donc, quand j'écrivis : "donc nous sommes conduit à prendre cette triple distinction, usage, travail, utilisation comme nécessaire pour subvenir à l’élucidation du pire traumatisme que le corps puisse supporter à savoir: l’inconscience de sa responsabilité vitale".  je voulais ouvrir un champs explicatif du fait que les humains se tournent de plus en plus vers une monomanie unissant la maîtrise et l'appropriation de la matière du monde, ou comme dit précédemment par la confusion entre l'usage, le travail et l'utilisation les faisant "glisser" de l'autonomie à l'autonomisation et de l'émancipation à la dénaturation...

la phase culturelle "psychologisante" (principalement de ces deux derniers siècles) maintient aussi l'intelligence naturelle humaine sous une confusion et pire dans une inversion, puisque si l'inconscient individuel n'existe pas, ce que cette psychologie a réussi en partie à produire, c'est bien cette inconscience de la responsabilité vitale de l'humain dans la nature (pollution, exploitation de la vie animale et destruction de la biodiversité etc..)

ceci dit ne réduisez pas cette lecture personnelle à une nostalgie de la mission biblique de l'homme gardien du jardin d'éden, il n'est pas ici lieu de faire des raccourcis caricaturaux, mais juste de souligner avec force que l'appropriation abusive de cette planète où nous vivons est en passe de toucher quelque chose d'inédit et d'irréversible, mais pas de cet inédit et de cette irréversibilité que produit l'évolution naturelle mais d'une autre, beaucoup plus morbide...

ce qui me permet d'éclaircir un deuxième point quand je vous disais  : "c'est aussi sans doute pourquoi beaucoup de machines sont aussi souvent vectrices de morts pour des individus vivants, car ces deux mouvements contraires, de la qualité vers la quantité et de la quantité vers la qualité, ne peuvent coexister sans s'opposer parfois et se détruire souvent". en effet je ne faisais pas uniquement allusion à l'accidentologie directe que produisent les machines, comme les voitures, les industries mécaniques alimentaires contre-nature ayant produit la vache folle, les herbicides, pesticides, et possiblement à terme le génie génétique qui perturbera inévitablement l'ordre naturel de la transmission génétique... bref, je voulais parler précisément des machines inversant l'ordre naturel qui, de la matière quantitative tournée vers la vie qualitative est comme conduite par une mouvement du singulier vers le multiple en générant le diverse,(et même si nous savons qu'aucune quantité n'existe dans le réel sans une certaine qualité et pareillement qu'aucune quantité n'existe dans le réel sans une certaine quantité), les machines inversent cet ordre naturel et font de la quantité à partir des qualités, ainsi toutes les machines qui non seulement produisent à l'identique mais aussi mesurent ou isolent ou même synthétisent telle qualité en la séparant quantitativement du réel, implique in fine une modification du milieu naturel ( routes, télévision, web, et bien sûr les machines telle que l'I.R.M utilisée dans les recherches théoriques...)

c'est donc lorsque certaines machines génèrent un savoir ou une transposition d'un savoir, que la question de la réversion de l'ordre naturel qualité/quantité en quantité/qualité est la plus subtile à trouver, puisque il s'agit de signaler comment et pourquoi une signification vraie mais partielle peut devenir fausse dans sa généralisation ou plus exactement dans "son retour au réel", ceci est un problème philosophique ancien mais toujours d'actualité il me semble...


Tout d'abord, il me semble inexact de dire que, d'après Aristote, la φύσις (nature) de l'homme  est tournée vers l'amitié et la contemplation. La nature humaine, pour Aristote, consiste en ce ζῷον πολιτικόν (animal politique) que nous sommes, c'est-à-dire en cette ὕλη (matière) biologique animée dont la μορφή (forme) réside dans les relations imposées par l'exigence de vivre dans une πόλις (Cité). A ce titre, la φιλία (amitié), tout comme la θεωρία (contemplation), ne sont que les limites vers lesquelles tend la nature humaine lorsqu'on se rapproche de son τέλος (fin), à savoir l'εὐδαιμονία (la vie bonne, le bonheur). Le problème étant, justement, que du point de vue d'Aristote lui-même, une telle limite ne peut être atteinte qu’asymptotiquement. Et c'est là le nœud du problème.

En effet, au chapitre IX de son Περὶ Ἑρμηνείας,  Aristote explique que, s'agissant des êtres contingents en général, les événements futurs sont nécessairement contingents. Donc, en particulier, pour les ζῷα (vivants), en tant qu'ils visent la ζῷή (vie) comme τέλος (fin), l'existence est, si l'on peut dire, nécessairement aléatoire. A fortiori lorsque le vivant dont il s'agit est l'être humain, lequel ne se contente pas d'envisager de vivre, mais prétend, en outre vivre bien, on comprend que son existence soit éminemment gouvernée par la τύχῃ (chance). Aristote est un philosophe grec antique : il n'échappe pas à la pensée tragique qui structure la société dont il fait partie, der hellenistische Pessimismus dont parlait Nietzsche.

Aussi, en me réclamant de la pensée téléologique aristotélicienne (dont l'actualité tragique ne m'a jamais paru aussi frappante qu'aujourd'hui), j'incline à considérer que, si l'humanité s'auto-détruit, ce n'est en rien en raison d'une faute qu'elle aurait commise à un instant crucial de son histoire, mais bien parce que c'est son destin. De votre côté, vous dites que "les humains se tournent de plus en plus vers une monomanie unissant la maîtrise et l'appropriation de la matière du monde, ou comme dit précédemment par la confusion entre l'usage, le travail et l'utilisation les faisant "glisser" de l'autonomie à l'autonomisation et de l'émancipation à la dénaturation...". Je suis d'accord avec tout ce que vous dites sauf pour ... le dernier mot. 

En parlant de "dénaturation", vous me semblez adhérer à une conception de l'humanité que je qualifierais d'apocalyptique dans le sens suivant : comme vous le savez, l'Αποκάλυψις Ιησού Χριστού ("la Révélation de Jésus-Christ" par Jean l'Evangéliste) met en scène tout à la fois les raisons de craindre la Colère de Dieu au spectacle lamentable du péché humain et le Jugement qui s'ensuivra ainsi que, dans le même temps, les raisons d'espérer la Rédemption par l'Amour du Fils de Dieu fait homme. Etant, personnellement, complètement athée, je ne discute pas la pertinence des termes et des métaphores utilisés dans ce texte. Je ne relève que ces deux points : 1) l'homme court à la catastrophe (je rappelle au passage que la καταστροφή est, dans une tragédie, le moment du dénouement fatal) parce qu'il a failli ; 2) il peut encore être sauvé par quelque intercession transcendante et miraculeuse.

Pour ma part je réfute, ces deux points. Relisons Descartes : "sitôt que j’ai eu acquis quelques notions générales touchant la physique, et que, commençant à les éprouver en diverses difficultés particulières, j’ai remarqué jusques où elles peuvent conduire, et combien elles différent des principes dont on s’est servi jusques à présent, j’ai cru que je ne pouvais les tenir cachées, sans pécher grandement contre la loi qui nous oblige à procurer, autant qu’il est en nous, le bien général de tous les hommes. Car elles m’ont fait voir qu’il est possible de parvenir à des connaissances qui soient fort utiles à la vie, et que [...] connaissant la force et les actions du feu, de l’eau, de l’air, des astres, des cieux et de tous les autres corps qui nous environnent, aussi distinctement que nous connaissons les divers métiers de nos artisans, nous les pourrions employer en même façon à tous les usages auxquels ils sont propres, et ainsi nous rendre comme maîtres et possesseurs de la Nature. Ce qui n'est pas seulement à désirer pour l'invention d'une infinité d'artifices, qui feraient qu'on jouirait, sans aucune peine, des fruits de la terre et de toutes les commodités qui s'y trouvent, mais principalement aussi pour la conservation de la santé ; laquelle est sans doute le premier bien et le fondement de tous les autres biens de cette vie"(Descartes, Discours de la Méthode, VI). Donc, le fait que les hommes se soient arrogés le statut de "maîtres et possesseurs de la nature" n'a rien de peccamineux. Simplement, comme le dit Aristote, ils ne se sont pas contentés de vivre, mais ont prétendu vivre bien. Et comme toute fin implique, c'est encore Aristote qui le souligne, le/les moyen/s de la viser, ils se sont, effectivement, dotés desdits moyens. 

Bref, la mécanisation du monde (l'arraisonnement de l'être par la technique, disait Heidegger) avec toutes les conséquences en chaîne que vous dénoncez n'est rien que la réalisation du "programme" cartésien dans les conditions pensées par Aristote. Est-ce que l'histoire de l'humanité aurait pu être autre ? La question n'a aucun sens ... historique. Le raisonnement contrefactuel n'au aucune validité historique : il peut être utilisé en droit ou en littérature, mais pas en histoire. Le déroulement de l'histoire est nécessaire par le seul fait qu'il soit passé et, donc, qu'il n'y a aucun moyen de le modifier. Il est nécessaire au sens logique où il ne peut plus être autre que ce qu'il est. Dire qu'il aurait pu être autre, c'est dire que, en t-n, on ne pouvait pas prévoir ce qui allait se passer en t (c'est-à-dire dans le futur de t-n), puisque les futurs sont contingents, avons-nous dit. Mais, une fois en t, la question ne se pose plus pour l'historien : se demander si les nazis auraient pu gagner la guerre a un sens pour Philip K. Dick, pas pour Wieviorka ou Noguères. Le passé est aussi nécessaire que le futur est aléatoire. C'est cela le destin. Ce n'est pas pour rien qu'en grec, on exprime cette notion soit par τύχῃ, "hasard", soit par son contraire, ἀνάγκη, "nécessité" !

Bref, l'humanité s'auto-détruit non pas parce que les hommes sont ignorants ou pervers mais parce qu'ils sont des hommes vivants, tout simplement. Depuis toujours, ils s'évertuent à vivre le mieux possible. L'histoire en témoigne. Pour cela, leurs mains ont mobilisé des moyens énormes, des forces physiques gigantesques à la hauteur de leur exceptionnelle intelligence, tant il est vrai que "ce n’est pas parce qu’il a des mains que l’homme est le plus intelligent des êtres, mais c’est parce qu’il est le plus intelligent qu’il a des mains"(Aristote, Parties des Animaux, 687a), voulant dire par là que c'est toujours la fin qui justifie les moyens et non l'inverse. Cela dit, et quoi qu'en pense le transhumanisme, ils n'ont pas vaincu la mort, puisque ce sont des êtres vivants ! De sorte que l'espèce humaine, comme n'importe quelle espèce vivante, est vouée à la mort nécessaire. Et si la mort n'est pas une option future, donc pas contingente, c'est qu'elle appartient, tout au contraire, au passé même de l'apparition du vivant. Sur ce point, c'est Freud qui a raison contre Heidegger : par nature, toute structure organique (individuelle ou spécifique) retourne nécessairement à l'inorganique (il est remarquable que l'intuition de Freud a été expérimentalement mise en évidence par Kerr, Wyllie et Currie en 1972 sous l’appellation de phénomène de l’apoptose, ou destruction cellulaire programmée) comme à son passé, de sorte qu'on ne peut pas dire que l'homme soit un Sein zum Tode (être-pour/vers-la-mort).


C'est donc en ce sens que je défends une conception tragique de l'histoire. Nous allons mourir : pas seulement vous et moi mais nous tous en tant qu'espèce. Et rien ni personne ne pourra nous sauver ! Il n'y a là nulle faute à imputer à l'humanité et, par conséquent, à rédimer. Tout au plus lui reprochera-t-on de précipiter sa destruction par l'espoir extravagant d'échapper à son destin. Œdipe quitte Corinthe et rejoint Thèbes. L'humanité invente le capitalisme.

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PhiloGL a écrit:
Il y a une contradiction dans votre démarche qui nous fait tourner en rond. D'un côté, vous souhaitez tester une hypothèse de manière scientifique et d'un autre côté vous présentez le travail de S. Dehaene comme une agression socio-philosophique  qui excite les anti-scientistes. Vous devriez avoir compris que ce ne sont pas eux qui sont compétents pour vous aider dans un projet de psychologie expérimentale. (Ni moi, car un biochimiste ce n'est pas un psychologue et je ne parviens pas à suivre la présentation de votre hypothèse, je l'ai déjà dit.)


On peut toujours trouver des contradictions dans une démarche. Je ne cesserai pas pour ma part de dire la simplicité et la logique de la mienne.

Stanislas Dehaene a écrit un ouvrage intitulé : "Le code de la conscience" où il prétend expliquer le processus physique par lequel un être vivant, humain en l'occurrence, accède à un état de conscience c'est-à-dire un état où se produisent des phénomènes internes à une subjectivité. J"ai pour ma part écrit un article dans lequel je critique la validité de ce processus. Tout en admettant que Dehaene a probablement trouvé des corrélats  physico-chimiques propres à l'apparition d'états de conscience, je conteste que le processus d'intégration d'informations tel qu'il le décrit par exemple dans le cas de la vision puisse expliquer l'émergence de l'état conscient.

A partir de mon article, évidemment beaucoup plus bref que l'ouvrage de Dehaene et beaucoup plus simple, je mets en débat dans ce forum la question suivante: "La théorie sur la conscience de Stanislas Dehaene est-elle juste ?"

A cette question, on peut évidemment répondre oui. C'est la réponse qu'a faite Azyb dans une intervention sans lendemain.

On peut aussi, bien entendu, répondre non. C'est le cas ici de la plupart des intervenants. Mais on peut le faire de deux façons très différentes. Pour Phiphilo, par exemple, Dehaene ne nous a pas donné le code de la conscience parce que la raison pour laquelle la conscience peut émerger chez l'animal n'est pas accessible à la connaissance scientifique. Il ne peut y avoir une étude empirique des phénomènes causalement liés à à l'apparition d'un contenu de conscience donné. La conscience est hors champ de l'étude scientifique. Phiphilo ne s'appuie pas, bien entendu, sur des études scientifiques pour affirmer cela mais uniquement sur des propos philosophique invoquant tour à tour Wittgensteim, Nagel, Spinoza ou Aristote et réclamant une soumission de la science à la philosophie.

Cette réponse qu'on peut qualifier de dogmatique met évidemment ici un terme au débat et, ailleurs, plus généralement, condamne la recherche scientifique qui s'aventurerait à chercher les causes de l'émergence de la conscience, le mécanisme physico-chimique qui pourrait la produire.

Une deuxième réponse négative possible, qui est la mienne, consiste à dire ceci. Non, le processus qu'expose Dehaene n'est pas apte à produire un contenu de conscience mais cela ne veut pas dire qu'il n'en existe pas un et que ce processus ne soit pas, au moins de façon indirecte, accessible à l'étude empirique. C'est ce type de réponse que je défends ici et je l'illustre avec ma propre théorie de l'émergence de la conscience que j'appelle le modulisme. En face de cette théorie, il en existe bien d'autres. Il suffit de faire une recherche sur internet avec l'entrée "théories de la conscience" pour s'en persuader : théorie quantique, théorie holistique, théorie, apparentée à celle de Dehaene, de l'information intégrée etc. Je m'étonne de ne pas les voir ici développées et défendues. Cela permettrait d'enrichir un débat qui a pris déjà une certaine ampleur par rapport aux autres dans cette partie du forum consacré aux "questions scientifiques" mais que des participants voudraient à tout prix restreindre, voire annihiler.

Pour revenir au modulisme, vous me dites que vous ne "parvenez pas à suivre la présentation de mon hypothèse". Cela m'étonne car il me semble présenter ma pensée de façon plus simple que Dehaene que vous êtes censé avoir lu pour participer à ce fil. Et surtout, il il me semble tellement naturel sur un forum de s'interroger les uns les autres sur nos propos si nous ne les comprenons pas dès l'abord. Pourquoi ne citez-vous pas précisément les passages où vous trouvez que mes explications ne sont pas claires ? Ces demandes d'éclaircissement qui doivent être réciproques sont la première condition pour échanger valablement sur nos positions respectives !

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clément dousset a écrit:
Pour revenir au modulisme, vous me dites que vous ne "parvenez pas à suivre la présentation de mon hypothèse". Cela m'étonne car il me semble présenter ma pensée de façon plus simple que Dehaene que vous êtes censé avoir lu pour participer à ce fil. Et surtout, il il me semble tellement naturel sur un forum de s'interroger les uns les autres sur nos propos si nous ne les comprenons pas dès l'abord. Pourquoi ne citez-vous pas précisément les passages où vous trouvez que mes explications ne sont pas claires ? Ces demandes d'éclaircissement qui doivent être réciproques sont la première condition pour échanger valablement sur nos positions respectives !


Je dois avouer quelque chose. J'ai lu la version anglaise du livre de S. Dehaene, et je me rends compte que cet exercice, utile pour conserver la pratique (de lecture de la langue anglaise) a le défaut de laisser peu de souvenirs de la lecture. J'ai signalé par ailleurs que ce livre m'avait peu intéressé, non seulement parce que je n'ai pas une formation de psychologue/neuroscientifique, mais aussi parce que mon expérience professionnelle m'a appris qu'il ne faut pas s'emballer lorsqu'un scientifique prétend avoir trouvé LA solution à un problème. Ceci permet aussi de prendre de la distance à l'égard d'affirmations que l'on peut entendre tous les jours durant le journal télévisé ou dans le mail mensuel du site Futura. Je me suis trouvé habilité à participer à votre sujet de discussion car les livres que j'ai lu précédemment (en Français) sur le sujet de l'étude scientifique de la Conscience, m'ont donné assez d'assurance sur le fait que l'on n'était pas prêt à trouver une théorie qui mérite le prix Nobel, et cela vaut tout aussi bien pour S. Dehaene. Ceci dit, il y a un gros problème avec la présentation de votre hypothèse. J'ai une certaine expérience de la soumission de projets de recherche ou de la rédaction d'articles scientifiques : il est absolument nécessaire d'introduire le projet par des références à des travaux préalables. Vous clamez "modulisme". Où puis-je trouver en Physique ou Neuropsychologie, des données dûment établies permettant de définir ce mot ? Si vous y tenez, vous pourriez reprendre la présentation en procédant par petits blocs, de telle sorte que je puisse mieux suivre et trier entre ce que je comprends et accepte, et ce qui nécessite des éclaircissements.

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Pour Phiphilo, par exemple, Dehaene ne nous a pas donné le code de la conscience parce que la raison pour laquelle la conscience peut émerger chez l'animal n'est pas accessible à la connaissance scientifique. Il ne peut y avoir une étude empirique des phénomènes causalement liés à à l'apparition d'un contenu de conscience donné. La conscience est hors champ de l'étude scientifique. Phiphilo ne s'appuie pas, bien entendu, sur des études scientifiques pour affirmer cela mais uniquement sur des propos philosophique invoquant tour à tour Wittgensteim, Nagel, Spinoza ou Aristote et réclamant une soumission de la science à la philosophie.


Encore une fois (mais bon, on a l'habitude) vous n'avez rien compris ! 

D'abord ce n'est pas parce que "la raison pour laquelle la conscience peut émerger chez l'animal n'est pas accessible à la connaissance scientifique" que, de mon point de vue, "Dehaene ne nous a pas donné le code de la conscience" puisqu'en épistémologie une raison est un moyen de preuve conceptuel et se distingue en cela d'une cause qui est un moyen de preuve empirique "nous cherchons une cause en essayant de repérer un mécanisme [...]. La raison n’est pas une explication conforme à une expérience, mais simplement une explication acceptée"(Wittgenstein, Leçons sur l’Esthétique, II, 34-39). En langage vernaculaire, on pourrait dire que la raison répond à la question "pourquoi ?", tandis que la cause explique le "comment ?". Comme je suppose que vous réduisez la "science" aux "sciences de la nature", il n'y a donc aucun sens à attendre de la science qu'elle rende raison de quoi que ce soit. Les sciences de la nature, au sens moderne (post-kantien) du terme, n'ont affaire qu'à des mécanismes causaux empiriques. Ce sont, en revanche, les sciences humaines, l'histoire et la philosophie qui donnent des raisons des phénomènes (humains).


Ensuite, il serait, bien entendu, absurde de prétendre qu'"il ne peut y avoir une étude empirique des phénomènes causalement liés à à l'apparition d'un contenu de conscience donné". Bien sûr que si qu'il peut, et même qu'il doit, y en avoir une. C'est exactement ce qu'on attend des sciences de la nature : qu'elles décrivent les conditions qui rendent possible l'émergence de la conscience sur la base d'études empiriques établissant le chemin causal qui va de l'inorganique jusqu'à l'organique conscient. Sauf que, pour la vingt-millionième fois, des conditions de possibilité sont nécessaires sans jamais être suffisantes. En d'autres termes, l'absence d'une au moins desdites conditions expliquera certainement, par exemple, un trouble pathologique de la conscience chez un patient humain. Mais la présence de toutes ces conditions empiriques ne rendra suffisamment compte d'aucune des innombrables manifestations de la conscience humaine. Par exemple, la sensibilité musicale : "tant qu’on ne voudra considérer les sons que par l’ébranlement qu’ils excitent dans nos nerfs, on n’aura point de vrais principes de la musique et de son pouvoir sur les cœurs. Les sons, dans la mélodie, n’agissent pas seulement sur nous comme sons, mais comme signes de nos affections, de nos sentiments Pourquoi nos plus touchantes musiques ne sont-elles qu’un vain bruit à l’oreille d’un Caraïbe ? Ses nerfs sont-ils d’une autre nature que les nôtres ? Pourquoi ne sont-il ébranlés de même ? Ou pourquoi ces mêmes ébranlements affectent-ils tant les uns et si peu les autres ?"(Rousseau, Essai sur l’Origine des Langues, xv).


Enfin, si "Phiphilo ne s'appuie pas, bien entendu, sur des études scientifiques pour affirmer cela mais uniquement sur des propos philosophique invoquant tour à tour Wittgensteim, Nagel, Spinoza ou Aristote et réclamant une soumission de la science à la philosophie" (passons sur les fautes d'orthographe !), c'est, d'une part parce que nous sommes sur un forum de philosophie, et que, même les "questions scientifiques" doivent y être abordées d'un point de vue conceptuel et non empirique, d'autre part, parce que, la "soumission" que je souhaite concerne, en l'occurrence, moins la science que son simulacre Canada Dry qu'est le scientisme. Mais je dois reconnaître que ce dernier est tellement naïf et caricatural que le philosophe joue sur du velours.


 Et surtout, il il me semble tellement naturel sur un forum de s'interroger les uns les autres sur nos propos si nous ne les comprenons pas dès l'abord. Pourquoi ne citez-vous pas précisément les passages où vous trouvez que mes explications ne sont pas claires ? Ces demandes d'éclaircissement qui doivent être réciproques sont la première condition pour échanger valablement sur nos positions respectives !


Hahahahaha ! Délire ? Mauvaise foi ? Cynisme ? Dans votre post du 28 novembre 2018 consacré, notamment, à l'"énergie psychique", vous employez 21 fois le mot "énergie" sans jamais le définir. Je vous l'ai fait remarquer et j'attends une définition (scientifique, si possible) de l'"énergie psychique" depuis le 43° (daté du 5 décembre) des 219 messages que contient ce fil de discussion. J'attends toujours.

Et puis d'abord est-ce que la conscience de quelque aux origines mélangées qui vit dans le 93 où les contrôles policiers se font au faciès, avec un environnement de béton partout et un taux de chomage élevé est la même que celle d'un foulard rouge qui manifeste avec 80 autres sur les Champs et qui rentre après regarder la télé chez lui avenue Foch voir si dans les infos on parle de lui ? Hein je vous le demande messieurs....


De Haine doit avoir la réponse.

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PhiloGL a écrit:
[size=16]Vous clamez "modulisme". Où puis-je trouver en Physique ou Neuropsychologie, des données dûment établies permettant de définir ce mot ? Si vous y tenez, vous pourriez reprendre la présentation en procédant par petits blocs, de telle sorte que je puisse mieux suivre et trier entre ce que je comprends et accepte, et ce qui nécessite des éclaircissements.
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Ne vous arrêtez pas au terme "modulisme". Ce n'est rien d'autre pour moi qu'une façon commode de désigner ma pensée. Je l'ai choisi simplement parcequ'il intègre à la fois l'idée de modulation de fréquence et de modulation d'amplitude qui affecte l'intensité du champ magnétique à l'intérieur du cerveau en corrélation avec une sensation donnée et l'idée de module constitué par un ensemble de neurones dont les décharges synchronisées produisent justement selon leur nature telle ou telle modulation. Mais inutile d'avoir tout cela à l'esprit avant de lire ma présentation du modulisme....

Avant d'avoir conçu le terme de modulisme, j'avais créé sur un forum de hardware.fr un fil de discussion intitulé "le champ de conscience inscrit dans le temps". L'idée que le champ de conscience est inscrit dans le temps est à la base de ma pensée. C'est cette idée que je développe dans la première partie de ma présentation que je recopie ici après l'introduction :


Cartographier dans le cerveau l'emplacement où naîtraient les qualia (1) qui font le contenu de l'expérience intime, la rougeur du rouge, la stridence du cri ou le ravissement sensuel qui nous saisit un matin de printemps dans un jardin en fleurs, cette idée ne quitte pas les savants spécialistes de l'esprit. Dans son livre : "Comment la matière devient consciente", Gerald Edelman évoque pour cela un espace à pas moins de 107 dimensions incluant et réordonnançant diverses assemblées de neurones dispersées dans le cerveau. Et si on ne cherchait pas au bon endroit ? Si la niche des qualia n'était pas dans les trois dimensions de l'espace même démultipliées mais dans une dimension unique, celle du temps ? C'est cette première hypothèse qui est à la base du "modulisme".

 
Les sensations façonnées dans le temps

Cette hypothèse a de quoi surprendre. Imaginons pour s'y accoutumer un monde enfantin qui ne serait fait que de chansons. Tous les objets qui le composent ne pourraient-ils pas tenir sur une même ligne, celle justement du temps ? Lorsqu'on entend un triple do suivi d'un ré, d'un mi et d'un ré encore, c'est la chanson Au clair de la lune qui se présente à notre esprit avec sa particularité mélodique presque aussi clairement distincte et compacte que le serait une odeur familière. Et la descente de gamme : la sol fa mi ré do avec la remontée : ré mi nous fera indéniablement songer à la Légende de Saint Nicolas. Si on considère ces deux mélodies comme des qualia distinctes, on peut dire qu'elles sont composées des mêmes éléments premiers, les notes, différemment disposées dans le temps. Avec une petite trentaine de notes (un peu plus de deux octaves et leurs demi-tons ) , un calibrage de durées allant de la quadruple croche à la ronde, on peut faire plus de mélodies qu'on en aura jamais la mémoire et créer le monde enfantin et chantant dont je parlais, ce monde dont les éléments premiers, les notes, ne coexistent que dans le seul espace du temps.
Mais si nous pouvons bien apercevoir que des notes distinctes se succèdent dans notre conscience lorsque nous écoutons de la musique, rien ne semble pouvoir percer la compacité d'une odeur qui, tant qu'on la respire, paraît toujours se succéder à elle-même dans les plus petits intervalles du temps et ne jamais laisser transparaître les éléments de ce qu'on pourrait appeler une "gamme olfactive". Ce qui est patent pour les odeurs l'est encore plus pour les couleurs. Certes, on sait bien qu'en peinture, on obtient de l'orange en mélangeant du jaune avec du rouge mais on n'imagine pas que, lorsqu'on voit une orange, se succèdent alternativement et vélocement un fruit jaune et un fruit rouge dans le champ de notre conscience. Lorsqu'on voit une orange, on la voit orange tout le temps.
La brève vidéo que je présente ci-dessous montre que la vérité pourrait pourtant être proche de ce qu'on n'imagine pas. La sensation ressentie à tester est celle de la couleur d'une surface occupant à un moment donné la totalité du champ visuel. Cette surface peut être confondue avec l'écran de la vidéo. Dans le montage que j'ai réalisé, j'ai fait se succéder alternativement des écrans jaunes et des écrans rouges. Ces écrans défilent d'abord à la vitesse de un par seconde. A ce rythme, on les voit bien se succéder nettement. Si la vitesse passe à huit écrans par seconde, la perception d'une succession de couleurs est encore absolument nette.


https://youtu.be/r5fJpxK1I2A

Seulement si la vitesse atteint 16 écrans par seconde, un phénomène nouveau apparaît dans notre champ visuel. La vision du rouge disparaît presque, celle du jaune également et l'on voit dominer une vague lueur orangée. A 32 écrans par seconde, l'écran est certes toujours trembleur mais apparaît nettement orange tandis que le jaune et le rouge ont disparu.
 
La capacité des logiciels de vidéo a ses limites, la manipulation de la perception visuelle par utilisation d'éclairs successifs a les siennes aussi. Ceci posé, on peut considérer qu'on a ici l'illustration de ce qui pourrait se passer communément lorsque nous ressentons une sensation unique. Ce qui existe dans notre champ de conscience dans la durée où nous le ressentons n'existe pas dans chacun des instants qui composent cette durée. Il n'y a pas d'écran orange dans le montage que j'ai fait. En revanche ce qui existe dans les instants de cette durée comme affects n'existe pas dans notre champ de conscience. Quand ils se succèdent toutes les 30 millisecondes, nous ne voyons ni l'écran jaune, ni l'écran rouge.
En disposant d'un logiciel d'édition aux performances accrues, d'une meilleure définition d'écran et en faisant le bon choix pour chacune des trois couleurs fondamentales, on pourrait faire apparaître sur l'écran de la vidéo chacune du million environ de nuances de teintes possibles alors que notre œil ne recevrait que des éclairs de jaune, de rouge ou de bleu purs.



 Quelques considérations supplémentaires :


Si vous essayez d'analyser le contenu de votre conscience  à l'instant présent, vous apercevez d'abord une réalité spatiale. Ce que vous ressentez dans vos mains, vos jambes, votre poitrine existe dans l'espace de votre corps, les bruits que vous entendez proviennent de divers endroits de votre chambre, les meubles que vous voyez se rangent à droite à gauche, tour près de vous ou au fond de la pièce. Le plancher est au-dessous de vous, le plafond au-dessus. Bref vous apercevez une multitude d'objets distincts qui cohabitent dans votre conscience parce qu'ils sont distribués dans les trois dimensions de l'espace. Tant que vous êtes assis sur votre chaise, accoudé à votre bureau et que votre regard ne bouge pas, le contenu de votre conscience semble s'identifier à la configuration fixe des objets que vous avez sous les yeux et à laquelle s'ajoutent les ressentis somesthésiques distribués à l'intérieur de votre corps. Le temps vous apparaît alors comme une réalité inexistante. Que vous considériez le sentiment actuel, le quale qui constitue le contenu de votre conscience pendant une durée d'une minute ou d'un millième de seconde, vous n'avez pas du tout le sentiment qu'il puisse le moins du monde changer de nature. Le champ de votre conscience vous paraît avoir une réalité dans l'espace indépendamment du temps.


Mon intuition est que la réalité subjective est toute autre. A un instant sans durée, ou du moins d'une durée limite, notre conscience se réduit à un ressenti premier, simple et unique. L'hypothèse sur laquelle je travaille n'est cependant pas tout aussi radicale. le sentiment instantané aurait plusieurs composantes au moins autant qu'il y a de types de sensations différentes. Il aurait ainsi une composante visuelle, auditive, olfactive, tactile, somesthésique...


Je tiens beaucoup à l'analogie avec la musique que je fais au second paragraphe. Lorsque vous pensez à une chanson (ou à un air), vous pensez d'abord à une mélodie rythmée. Cette mélodie se présente à votre esprit comme une image mentale compacte, ayant sa particularité propre. Or cette particularité particulière et compacte n'existe pas hors du temps, n'existe pas hors de la succession des quelques diverses notes de durée calibrée qui la constituent...


Si vous écoutez la Mer de Debussy, il vous semble parfois apercevoir le moiré de la surface liquide, l'ondulation lègère des vagues, leur gonflement houleux, la transparence soudaine de l'eau où joue la faune marine. Vous sentez le brassement de l'air, les grands et soudains tourbillons du vent. Vous percevez le ciel qui blémit au-dessus de l'écume jaunissante entre deux rayons de soleil furtifs. Et tout ce spectacle dans l'immense espace que vous embrassez ne se construit qu'à partir des vibrations de votre tympan, donc qu'à partir d'une réalité purement temporelle...


Je ne veux pas développer plus avant la paraphrase sur cette première partie sans savoir sur quoi vous accrochez...
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