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Spinoza : un philosophe à part.

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descriptionSpinoza : un philosophe à part. - Page 3 EmptyRe: Spinoza : un philosophe à part.

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Liber le Lun 12 Nov 2012 - 15:49

Euterpe a écrit:
Liber a écrit:
On peut aussi bien revenir à l’antiquité, à un Démocrite par exemple, pour une explication du monde sans une Raison divine.

Sauf que Spinoza ne demande à personne de devenir spinoziste, mais de faire avec ce qu'il a. Sa philosophie se résume à ça.

Je ne vois pas pourquoi vous répondez cela. Y a-t-il une intelligence dans le monde ou pas ? Pour Démocrite, pour Schopenhauer, pour Nietzsche, il n'y en a pas. Pour Spinoza, il y en a une. Il y a encore un Dieu. Deus sive natura. Il aurait pu aller plus loin : natura sive natura. Des atomes et rien d'autre.

Euterpe a écrit:
Et qu'est-ce que le conatus, sinon un mouvement ?

Si c'est "le désir de persévérer dans son être", c'est un drôle de mouvement. Je comprends que Nietzsche y ait vu un instinct de conservation. La philosophie de Spinoza est le pendant de celle de Parménide, quand celle de Nietzsche est héraclitéenne, pour reprendre les deux grandes écoles de la Grèce.

Euterpe a écrit:
Liber a écrit:
Quant à la volonté allemande, elle est une sorte d'instinct vital, quelque chose d'animal.

Toujours, cette tendance allemande à scruter l'insondable.

J'aurais dit le contraire, la Volonté chez Schopenhauer reste insondable, elle est une sorte de trou noir. Schopenhauer cherche d'ailleurs à l'abolir, il ne cherche pas à la connaître, ce serait inutile, elle est sans raison. Il est absurde de chercher à connaître quelque chose d'inconnaissable par nature.

Euterpe a écrit:
Liber a écrit:
Spinoza propose une ascèse

Ni saint, ni ascète, c'est un "mutant". Le saint et l'ascète ont renoncé à quelque chose. Spinoza, non.

Spinoza a renoncé à toute passion violente.

Euterpe a écrit:
Liber a écrit:
"Tout ce qui est est beau...", blablabla, ça ne me touche pas. Platon a déjà proposé de nous amener à la beauté. Il y a là un miroir aux alouettes, la recherche indéfinie d'une fin, une quête. D'autres philosophes me paraissent bien plus proches de l'être, Épicure par exemple. Vous pouvez appliquer sa philosophie à l'instant.

L'épicurisme est si facile d'application parce qu'il consiste en une soustraction.

Je n'ai pas dit que l'épicurisme était facile à appliquer, mais qu'il n'y avait pas de quête. Du reste, le conseil que donne Spinoza de manger léger, de se divertir avec de la musique douce, des amis, ressemble fort à l'épicurisme.

Voici le blabla sur la quête dont je parlais (fin de l'Éthique) :
La voie que j'ai montrée pour atteindre jusque-là paraîtra pénible sans doute, mais il suffit qu'il ne soit pas impossible de la trouver. Et certes, j'avoue qu'un but si rarement atteint doit être bien difficile à poursuivre ; car autrement, comment se pourrait-il faire, si le salut était si près de nous, s'il pouvait être atteint sans un grand labeur, qu'il fût ainsi négligé de tout le monde ? Mais tout ce qui est beau est aussi difficile que rare.

Ça reste une ascèse, une discipline, un exercice. Le mot "salut" est aussi très curieux, de la part de quelqu'un qui, selon vous, est si content de ce qui est. Si Spinoza avait été aussi content d'être, pourquoi nous parler de salut ? Pourquoi même philosopher, s'il n'avait aucune inquiétude de l'âme ?

Euterpe a écrit:
Spinoza n'est ni content ni mécontent de tout ce qui est : il est content que ce qui est soit

Bon, il n'est pas nihiliste, c'est un fataliste doux.

Euterpe a écrit:
Mais connaître, c'est agir.

Voilà bien le philosophe, le Sage, pour qui toute la vie est connaissance.

Euterpe a écrit:
On voit mal Spinoza rendre visite à Gœthe, Schopenhauer, ou Nietzsche, pour leur affirmer que leur caractère n'est pas le leur, et qu'ils jugent mal de ce qui est bien pour eux. Le bonheur n'est pas ceci plutôt que cela, mais connaître que ce qui est, est.

Il est vrai que Nietzsche est à l'opposé d'une telle attitude, il reproche et critique sans cesse. Cependant, encore une fois vous mettez en lumière ce détachement du sage chez Spinoza. Le philosophe doit-il être détaché ou non ? C'est une vieille question, déjà débattue chez les Grecs.

Euterpe a écrit:
Olympien ? Sceptique ? Indifférent ? Il ne dit rien ? Dans ce cas, il ne s'agit plus de Spinoza.

A chaque fois que je lis quelque chose sur Spinoza, il en ressort le calme olympien, le détachement, la hauteur de vue du Sage. Je n'aime pas cette façon de philosopher, en fait je ne l'aime pas depuis le Socrate du Phédon. Je la trouve trop confortable, et justement, si j'apprécie autant Nietzsche, c'est qu'il a refusé cette facilité du détachement bienheureux (cf. le Socrate fatigué, le Socrate las de vivre de Nietzsche).

Dernière édition par Euterpe le Mar 9 Aoû 2016 - 13:28, édité 2 fois

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JimmyB le Lun 12 Nov 2012 - 16:12

Liber a écrit:
Euterpe a écrit:
Liber a écrit:
On peut aussi bien revenir à l’antiquité, à un Démocrite par exemple, pour une explication du monde sans une Raison divine.

Sauf que Spinoza ne demande à personne de devenir spinoziste, mais de faire avec ce qu'il a. Sa philosophie se résume à ça.

Je ne vois pas pourquoi vous répondez cela. Y a-t-il une intelligence dans le monde ou pas ? Pour Démocrite, pour Schopenhauer, pour Nietzsche, il n'y en a pas. Pour Spinoza, il y en a une. Il y a encore un Dieu. Deus sive natura. Il aurait pu aller plus loin : natura sive natura. Des atomes et rien d'autre.

Qu'entendez vous par intelligence ?

Chez Spinoza, la nature est, et est ainsi, simplement parce que Dieu existe de telle manière. Dieu n'est qu'une cause première, il n'y a pas de dessein. Or vous semblez induire qu'il existe un Dieu intelligent et qui par une volonté anthropomorphique créé le monde. J'ai sûrement mal compris c'est pour cela que je vous pose la question.

Dernière édition par Euterpe le Mar 9 Aoû 2016 - 13:24, édité 1 fois

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Liber le Lun 12 Nov 2012 - 16:18

Non, pas du tout de dessein intelligent. Spinoza aurait pu se contenter de sa propre raison, sans chercher à en faire une raison divine. C'est du reste la critique de Nietzsche, concernant son judaïsme, de même que le peuple hébreu a fait de son Dieu LE Dieu. Chercher à faire un monde parfait, divinisé, alors que pour Nietzsche, c'est un chaos. Ici vous pensez sans doute plus à Leibniz (la Théodicée), en me lisant. Il a fallu attendre Schopenhauer pour trouver un philosophe (hormis les matérialistes) établissant un monde sans Dieu, donc sans intelligence. Un monde qui ressemble à un océan en furie. Ni une musique des sphères organisée par un esprit supérieur, ni un monde stable et parfait. Pour moi, c'est une prise de conscience sans précédent depuis les Grecs.

Dernière édition par Euterpe le Mar 9 Aoû 2016 - 13:26, édité 1 fois

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Euterpe le Mar 13 Nov 2012 - 3:12

Liber a écrit:
Euterpe a écrit:
Liber a écrit:
On peut aussi bien revenir à l’antiquité, à un Démocrite par exemple, pour une explication du monde sans une Raison divine.

Sauf que Spinoza ne demande à personne de devenir spinoziste, mais de faire avec ce qu'il a. Sa philosophie se résume à ça.

Je ne vois pas pourquoi vous répondez cela.

J'entends par là que la philosophie de Spinoza n'implique aucune adhésion, comme on dit qu'on adhère par exemple à un mouvement de pensée ou à un penseur (rationalisme, cartésianisme, platonisme, etc.). Or il faudrait que ce soit le cas pour qu'on fût en état de choisir entre sa philosophie et une autre, qu'il s'agisse du matérialisme de Démocrite ou d'autre chose. Le spinozisme est incommensurable avec les autres philosophies (ce qui ne consiste pas, pour ma part, à lui donner un quelconque privilège ou une quelconque préférence : je ne parle pas des philosophes que je préfère - du reste, je n'ai pas participé au sondage). Il l'est d'autant moins que Spinoza, comme chacun sait, n'aimait pas les objections. On ne trouve pas, chez lui, l'influence d'un autre philosophe ou d'une autre école de pensée (je parle d'influence explicite, revendiquée, assumée). Il ne se réfère qu'à la nature. Il y a peu ou pas de philosophes dans ce cas (Aristote les passe tous en revue, Platon se réfère aux présocratiques et aux sophistes, etc.). Bref, dire qu'on pourrait choisir Démocrite plutôt que Spinoza, c'est dire qu'on a le choix entre plusieurs options. Le problème, c'est que la solitude de Spinoza l'interdit ; comme sa philosophie, solitaire comme l'est celle de Nietzsche (qui a fait école, malgré lui).

Liber a écrit:
Y a-t-il une intelligence dans le monde ou pas ? Pour Démocrite, pour Schopenhauer, pour Nietzsche, il n'y en a pas. Pour Spinoza, il y en a une. Il y a encore un Dieu. Deus sive natura. Il aurait pu aller plus loin : natura sive natura. Des atomes et rien d'autre.

Desassossego a écrit:
malgré l'immanentisme et l'antifinalisme de Spinoza, la nature reste avec lui une chose pensante.


Vous ne prenez pas la question par le bon bout. L'affaire est beaucoup plus simple. Il y a la nature, la pensée est un attribut de la nature ; si la pensée est un attribut de la nature (et comment ne le serait-elle pas, puisque les hommes pensent ?), il y a une intelligence dans le monde. C'est le cas aussi bien chez Nietzsche, Schopenhauer ou Démocrite, que Spinoza plaçait au-dessus de Platon et d'Aristote eux-mêmes, c'est dire à quoi peut bien ressembler le prétendu "dieu" de Spinoza. Lettre 56, Spinoza à Boxel (1674) :
L’autorité de Platon, d’Aristote, etc. n’a pas grand poids pour moi : j’aurais été surpris si vous aviez allégué Épicure, Démocrite, Lucrèce ou quelqu’un des Atomistes et des partisans des atomes. Rien d’étonnant à ce que des hommes qui ont cru aux qualités occultes, aux espèces intentionnelles, aux formes substantielles et mille autres fadaises, aient imaginé des spectres et des esprits et accordé créance aux vieilles femmes pour affaiblir l’autorité de Démocrite. Ils enviaient tant son bon renom qu’ils ont brûlé tous les livres si glorieusement publiés par lui.


Liber a écrit:
Euterpe a écrit:
Et qu'est-ce que le conatus, sinon un mouvement ?

Si c'est "le désir de persévérer dans son être", c'est un drôle de mouvement. Je comprends que Nietzsche y ait vu un instinct de conservation.

Ce n'est pas l'instinct de conservation. Le conatus, c'est le devenir en acte.

Liber a écrit:
La philosophie de Spinoza est le pendant de celle de Parménide, quand celle de Nietzsche est héraclitéenne, pour reprendre les deux grandes écoles de la Grèce.

Là encore, vous germanisez Spinoza.

Liber a écrit:
Il est absurde de chercher à connaître quelque chose d'inconnaissable par nature.

C'est pourquoi Spinoza se contente de la pensée et de l'étendue.

Liber a écrit:
Spinoza a renoncé à toute passion violente.

Quand je renonce à trucider ma concierge, je ne renonce à rien.

Liber a écrit:
le conseil que donne Spinoza de manger léger, de se divertir avec de la musique douce, des amis, ressemble fort à l'épicurisme.

Or Spinoza appréciait fort Épicure, autant que Démocrite.

Liber a écrit:
Bon, il n'est pas nihiliste, c'est un fataliste doux.

Il rejette aussi le fatalisme ! Traité théologico-politique, chap. 4 :
Le nom de loi, pris d’une manière absolue, signifie ce qui impose une manière d’agir fixe et déterminée à un individu quelconque, ou à tous les individus de la même espèce, ou seulement à quelques-uns. Cette loi dépend d’une nécessité naturelle, ou de la volonté des hommes : d’une nécessité naturelle, si elle résulte nécessairement de la nature même ou de la définition des choses ; de la volonté des hommes, si les hommes l’établissent pour la sécurité et la commodité de la vie, ou pour d’autres raisons semblables. Dans ce dernier cas, elle constitue proprement le droit. Par exemple, que tout corps qui choque un corps plus petit perde de son propre mouvement ce qu’il en communique à l’autre, voilà une loi universelle des corps qui résulte nécessairement de leur nature. De même encore, c’est une loi fondée sur la nécessité de la nature humaine, que le souvenir d’un certain objet rappelle à l’âme un objet semblable ou qu’elle a perçu en même temps que le premier. Mais quand les hommes cèdent ou sont forcés de céder une partie du droit qu’ils tiennent de la nature, et s’astreignent à un genre de vie déterminé, je dis que cela dépend de leur bon plaisir. Ce n’est pas que je n’accorde pleinement que toutes choses, sans exception, sont déterminées par les lois universelles de la nature à exister et à agir d’une manière donnée ; mais il y a deux raisons qui me font dire que certaines lois dépendent du bon plaisir des hommes. 1° L’homme, en tant qu’il est une partie de la Nature, constitue une partie de la puissance de la Nature. Par conséquent, tout ce qui résulte nécessairement de la nature humaine, c’est-à-dire de la Nature en tant qu’on la conçoit déterminée par la nature humaine, tout cela résulte, bien que nécessairement, de la puissance de l’homme : d’où il suit qu’on peut dire, en un sens excellent, que l’établissement des lois de cette espèce dépend du bon plaisir des hommes. Elles dépendent en effet de leur puissance, à ce point que la nature humaine, en tant qu’elle perçoit les choses comme vraies ou fausses, se peut comprendre très-clairement, abstraction faite de ces lois, tandis qu’elle est inintelligible sans ces autres lois nécessaires que nous avons définies plus haut. 2° Ma seconde raison, c’est que nous devons définir et expliquer les choses par leurs causes prochaines. Or, la considération du fatum en général et de l’enchaînement des causes ne peut nous servir de rien pour former et lier nos pensées touchant les choses particulières. J’ajoute que nous ignorons complètement la coordination véritable et le réel enchaînement des choses ; et par conséquent il vaut mieux pour l’usage de la vie, et il est même indispensable de considérer les choses, non comme nécessaires, mais comme possibles. Je n’en dirai pas davantage sur la loi prise d’une manière absolue.


Liber a écrit:
Euterpe a écrit:
On voit mal Spinoza rendre visite à Gœthe, Schopenhauer, ou Nietzsche, pour leur affirmer que leur caractère n'est pas le leur, et qu'ils jugent mal de ce qui est bien pour eux. Le bonheur n'est pas ceci plutôt que cela, mais connaître que ce qui est, est.

Il est vrai que Nietzsche est à l'opposé d'une telle attitude, il reproche et critique sans cesse. Cependant, encore une fois vous mettez en lumière ce détachement du sage chez Spinoza. Le philosophe doit-il être détaché ou non ? C'est une vieille question, déjà débattue chez les Grecs.

Question de caractère, plutôt que question normative, à mon sens. Entre la solitude mystique d'un Spinoza, et la solitude tragique d'un Nietzsche, je ne balance pas : je me sens en syntonie avec Nietzsche, plutôt qu'avec Spinoza, dont la maîtrise de soi est sidérante (allez, lâchons le mot : il y a du refoulement, chez lui). Mais Spinoza n'est pas l'insensible qu'on a beaucoup prétendu qu'il est. Pas quand on a vécu ce qu'il a vécu. Aussi étonnant que cela puisse paraître, j'ai de la sympathie, et une sympathie de plus en plus grande, pour l'homme qu'il fut. Après, ce n'est pas aux autres d'être sympathiques, mais à soi d'être empathique (au sens le plus strict et rigoureux de ce terme bafoué).

Liber a écrit:
si j'apprécie autant Nietzsche, c'est qu'il a refusé cette facilité du détachement bienheureux (cf. le Socrate fatigué, le Socrate las de vivre de Nietzsche)

Ce Nietzsche qui vous plaît tant (et à moi aussi), c'est un Nietzsche référé à Kant, plutôt qu'à Spinoza. C'est le Nietzsche qui dit que ce qui est vrai ou faux, le bien ou le mal, on s'en contrefiche, que ce qui compte, c'est ce qui est noble ou ignoble.

Dernière édition par Euterpe le Dim 14 Aoû 2016 - 0:54, édité 3 fois

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Liber le Mar 13 Nov 2012 - 10:20

Euterpe a écrit:
On ne trouve pas, chez lui l'influence d'un autre philosophe ou d'une autre école de pensée (je parle d'influence explicite, revendiquée, assumée).

En effet, Spinoza ne cite presque personne. Alors que Nietzsche, qui doit être le philosophe ayant le plus cité, était un faux solitaire. Néanmoins, la philosophie me paraît plus une activité d'homme social que celle d'un anachorète, et je ne trouve aucune grandeur à ne pas vouloir dialoguer.

Euterpe a écrit:
si la pensée est un attribut de la nature (et comment ne le serait-elle pas, puisque les hommes pensent ?), il y a une intelligence dans le monde. C'est le cas aussi bien chez Nietzsche, Schopenhauer ou Démocrite, que Spinoza plaçait au-dessus de Platon et d'Aristote eux-mêmes, c'est dire à quoi peut bien ressembler le prétendu "dieu" de Spinoza.

Il n'y a d'intelligence dans le monde qu'humaine, pour ces trois là.

Euterpe a écrit:
Ce n'est pas l'instinct de conservation. Le conatus, c'est le devenir en acte.

Pourquoi vouloir "persévérer" ? Dans un monde qui change sans cesse, l'individu ne veut pas changer, il ne veut pas mourir. Sauf que ce n'est pas naturel, c'est seulement humain. Car tout être vivant veut grandir, c'est son destin, contrecarré par la vieillesse et la mort, ainsi que par les ressources dont il dispose pour se développer. L'instinct de conservation est du reste en contradiction chez Darwin avec la lutte des espèces, qui s'affrontent non seulement pour survivre, mais pour prospérer.

Euterpe a écrit:
Liber a écrit:
La philosophie de Spinoza est le pendant de celle de Parménide, quand celle de Nietzsche est héraclitéenne, pour reprendre les deux grandes écoles de la Grèce.

Là encore, vous germanisez Spinoza.

Cette distinction existait bel et bien dans l'Antiquité. Elle n'est pas une invention allemande. Déjà les Stoïciens divinisaient la nature.

Euterpe a écrit:
Liber a écrit:
Spinoza a renoncé à toute passion violente.

Quand je renonce à trucider ma concierge, je ne renonce à rien.

Argument fallacieux, qui vaut pour toute expérience. On peut renoncer à presque tout, du reste, c'est bien le fonctionnement des Épicuriens (dont Spinoza me semble très proche), qui renoncent à toute passion violente par crainte de maux plus grands. Si Spinoza avait été aussi affirmatif que vous le dites, il eût été nietzschéen. Quelqu'un qui affirme le monde le prend dans sa totalité, le bon et le mauvais, la joie et la souffrance. Il ne préconise pas de se contenter de l'amitié au lieu de l'amour, de la musique douce au lieu de la violente, de mets légers au lieu de festins (conseil de régime de l'Éthique confirmé par le litre de vin par mois de Spinoza), etc.

Euterpe a écrit:
Liber a écrit:
le conseil que donne Spinoza de manger léger, de se divertir avec de la musique douce, des amis, ressemble fort à l'épicurisme.

Or Spinoza appréciait fort Épicure, autant que Démocrite.

Je m'en aperçois au vu de sa philosophie.

Euterpe a écrit:
Liber a écrit:
Ça reste une ascèse, une discipline, un exercice. Le mot "salut" est aussi très curieux, de la part de quelqu'un qui, selon vous, est si content de ce qui est. Si Spinoza avait été aussi content d'être, pourquoi nous parler de salut ? Pourquoi même philosopher, s'il n'avait aucune inquiétude de l'âme ?

Le spinozisme comme théorie philosophique du Salut est une interprétation allemande

Spinoza emploie le mot. L'impression que me donne ce passage est que Spinoza veut nous faire envie de son bonheur, il me fait penser à de la frustration. Que je préfère Nietzsche, pour qui tout but est une servitude.

Euterpe a écrit:
Liber a écrit:
Bon, il n'est pas nihiliste, c'est un fataliste doux.

Il rejette aussi le fatalisme !

Et après ? Cela ne l'empêche pas d'être fataliste dans sa façon de voir la vie, c'est-à-dire accepter le destin, mais comme je le dis, avec douceur, pas avec violence. Nietzsche dira amor fati, forçant le trait dans une formule masochiste.

Euterpe a écrit:
Mais Spinoza n'est pas l'insensible qu'on a beaucoup prétendu qu'il est. Pas quand on a vécu ce qu'il a vécu.

Épicurien, et aussi stoïcien. Mais comme vous l'avez dit, cela ne va pas sans auto-contrainte.

Euterpe a écrit:
Liber a écrit:
si j'apprécie autant Nietzsche, c'est qu'il a refusé cette facilité du détachement bienheureux (cf. le Socrate fatigué, le Socrate las de vivre de Nietzsche)

Ce Nietzsche qui vous plaît tant (et à moi aussi), c'est un Nietzsche référé à Kant, plutôt qu'à Spinoza. C'est le Nietzsche qui dit que ce qui est vrai ou faux, le bien ou le mal, on s'en contrefiche, que ce qui compte, c'est ce qui est noble ou ignoble.

Attention à ne pas faire de Nietzsche un moraliste sans Bien et Mal, un moraliste aristocratique. L'anecdote des araignées tend à montrer, même si elle est inventée, que Spinoza était aussi par-delà Bien et Mal. Cependant, cela ne doit pas nous rendre insensibles, par confort personnel. Nietzsche est un indigné, non par moralisme, mais par abondance de vitalité. Chaque fois qu'il critique, il le fait contre des gens qui nient ou retirent quelque chose de la vie. Nietzsche la veut dans sa totalité. Or, j'en parle depuis hier, Spinoza ne me donne pas l'impression de vouloir vraiment la totalité de la vie.

Dernière édition par Euterpe le Mar 9 Aoû 2016 - 13:41, édité 1 fois
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