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L'angoisse

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Liber
Euterpe
benfifi
7 participants

descriptionL'angoisse - Page 3 EmptyRe: L'angoisse

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Ronin a écrit:
Le stress est généré par la création en l'esprit de scénarios du pire. La pensée est suractivée par sa "volonté" (il s'agit en fait d'automatismes qui ont tendance à amplifier) d'imaginer ce qui risque de se produire. Un "terrain" rendu sensible par une "aventure", ou une suite d'expériences ressenties comme "négatives" sera enclin à produire davantage les schémas de pensée de nature à générer ce stress.
L'angoisse s'auto-alimente en effet, et la tendance au pire, au pessimisme, voire au catastrophisme, est souvent très prononcée. D'où l'importance des stratégies "maniaques", tout ce qui implique une ritualisation, la répétition d'un geste, d'un acte ou d'une activité permettant d'aplanir le quotidien, de limiter les risques liés à l'irruption du nouveau. Les habitudes sont vitales pour les angoissés : ils vivent en terrain connu, prévisible, mécanique.

Mais le pessimisme est parfois si fort, et amplifie d'autant l'angoisse qu'on se retrouve avec des phénomènes intéressants comme la prémonition, le sentiment qu'un malheur va s'abattre sur un être proche. La prémonition est une activité mnésique "originale" : c'est la mémoire au futur, une stratégie de défense qui scénarise l'angoisse en la liant à un événement futur éventuel et d'autant plus redouté qu'il est craint, anticipé, donc déjà "présent". Face à cet inévitable malheur à venir, on se défend en le vivant d'avance, autrement dit en acceptant d'en subir les conséquences qui iraient avec s'il se produisait : le deuil, s'il s'agit d'un décès. De sorte que l'angoissé vit la perte intérieurement avant qu'elle ne se produise réellement. C'est typique d'une stratégie de défense. Et ça révèle comme l'instinct de survie d'un angoissé est d'autant plus prononcé qu'il est angoissé.

benfifi a écrit:
Mais après coup, une fois la crise d'angoisse passée, il m'arrive de me dire que ça ne pouvait pas louper. En reprenant le fil de l'histoire, je finis par isoler l'évènement déclencheur, et le souvenir du risque ressenti : angoisse en vue. Un peu comme une réaction en deux temps : Le coup de vent, puis l'averse. Dans ce cas, si l'angoisse ne se commande pas, elle n'en est pas moins fortement prévisible.
Prévisible pour plusieurs raisons, dont la principale veut qu'à partir du moment où quelqu'un est tombé dans l'angoisse, il n'en sortira plus. Il y a des cycles, des crises, un processus à l'œuvre ; mais comme pour la cyclothymie, qui alterne dépression et excitation, l'angoisse alterne "panique" et "calme plat". Quand l'irruption du nouveau déchire le voile de l'habitude, quand un grain de sable vient gripper le mécanisme du quotidien qu'on a mis tant d'effort à élaborer, et qui reste fragile, on cède à la panique. Au fond, il faudrait comparer les événements, et voir s'ils ont des points en commun, quant à leur signification, etc. ; mais d'une manière générale, un événement est par définition du nouveau qui surgit, et comme il ne peut pas ne pas se faire qu'un événement se produise, l'angoisse est prévisible. Mais prévisible comme la mort : on sait qu'on va mourir ; quant à savoir à quel moment, c'est ce que nul ne saurait affirmer.

descriptionL'angoisse - Page 3 EmptyRe: L'angoisse

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Euterpe a écrit:
D'abord, si l'angoisse incline plus vers la création, rien ne permet de dire que la majorité des angoissés s'orientent vers l'activité artistique (cf. le vieux débat sur la folie et le génie).

En effet, l'art demande des efforts considérables, par eux-mêmes à la fois créateurs d'angoisse (la recherche de l'idéal par exemple), et libérateurs (par l'action elle-même, qui engendre la fatigue).

Tennessee Williams a écrit:
J'ai passé ma journée à peindre...
J'ai achevé ce tableau en dix heures.
Je ne me suis arrêté que pour manger,
Et, je suis si fatigué que je tombe de sommeil !
Non, il n'est rien au monde
De plus épuisant que de peindre :
Ce n'est pas seulement le corps qui se fatigue,
ll semble que l'on se consume de l'intérieur !
Comprenez-vous ce que je veux dire ? C'est.., comme si une part de l'être brûlait à l'intérieur...
Mais, en achevant l'oeuvre,
On sent que l'on a rempli une mission
Et l'on a la sensation de faire partie de quelque chose..
De quelque chose de grand et d'élevé...


Ensuite, l'inhibition opère principalement au niveau du langage, or même un inhibé a besoin de s'exprimer, il le fait par des moyens dissimulés, discrets, par toutes les voies qu'il juge propres à le protéger des autres. Les activités artistiques supposent de la solitude, du silence, de la concentration, etc. Elles sont donc favorables.

Il est certain que l'artiste cherche à se cacher. Je parlais plus haut de la ruse, de la dissimulation. Cela dit, j'en faisais non pas le résultat d'une peur des autres, mais la volonté délibérée de briser la rigueur de la vie.

Enfin, je suis toujours sceptique avec la thèse de l'exutoire libérateur. Si elle était absolument vraie, une fois libéré, un artiste renoncerait à son activité artistique.

Cela s'est déjà vu. En fait, rares sont les artistes qui recommencent deux fois la même œuvre. Pour être un artiste prolifique, il faut donc faire vivre beaucoup de sentiments en soi-même. Flaubert, par exemple, n'a écrit qu'un seul roman, Madame Bovary, tous les autres sont des imitations de celui-ci. Un artiste plus "inspiré" saura faire naître et vivre en lui-même quantité d'émotions, tel Shakespeare.

descriptionL'angoisse - Page 3 EmptyRe: L'angoisse

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Ronin a écrit:
Ce que vous dites là est fort intéressant, parler de "prémonition" nous ferait glisser sur un autre sujet et ce n'est point mon intention de pousser dans ce sens, mais je voudrais apporter une petite contribution sous forme de questionnement. Vous parlez de "mémoire du futur" là où je parlerais de "calculs", l'inconscient ne ferait-il pas plutôt des assemblages ou des "équations avec inconnues" afin de prévoir ou proposer un certain nombre d'hypothèses, de "possibles" éventualités auxquelles il conseillerait notre "machine" de se préparer ?

Votre formulation correspond assez bien à ce que j'entends pas prémonition ou "mémoire au futur". La prémonition n'est pas une forme de certitude ; c'est une incertitude si angoissante que, pour "savoir" d'avance, on fait un calcul de probabilité, qui tombe souvent juste, non quant à l'exactitude des circonstances d'un événement redouté, mais quant à sa nature, sa vérité : la perte d'un être aimé par exemple. La prémonition, en ce sens, c'est "se préparer à", oui.

Liber a écrit:
Enfin, je suis toujours sceptique avec la thèse de l'exutoire libérateur. Si elle était absolument vraie, une fois libéré, un artiste renoncerait à son activité artistique.

Cela s'est déjà vu. En fait, rares sont les artistes qui recommencent deux fois la même œuvre. Pour être un artiste prolifique, il faut donc faire vivre beaucoup de sentiments en soi-même. Flaubert, par exemple, n'a écrit qu'un seul roman, Madame Bovary, tous les autres sont des imitations de celui-ci. Un artiste plus "inspiré" saura faire naître et vivre en lui-même quantité d'émotions, tel Shakespeare.

Je pensais à Rimbaud, pendant que j'écrivais cela, mais il n'est pas réductible à l'angoisse, quoiqu'elle soit importante chez lui. Pour la thèse "libératrice", je sous-entendais "libéré de l'angoisse". De toute façon l'angoisse est nourricière, vitale ; il s'agit d'en faire quelque chose qui contribue à l'intelligence de notre rapport au monde, en éclairant nos émotions et nos sentiments. Au fond, il faut une confiance immense à un artiste qui œuvre, son activité créatrice lui procure les conditions d'une vie idéale.

Dernière édition par Euterpe le Dim 9 Fév 2014 - 18:12, édité 1 fois

descriptionL'angoisse - Page 3 EmptyRe: L'angoisse

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Pensez-vous que l'angoisse puisse se soigner ? Pensez-vous que l'angoisse fait ce qu'on appelle les fous ?

descriptionL'angoisse - Page 3 EmptyRe: L'angoisse

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J'ai du mal à me figurer le comportement d'un angoissé, étant donné que j'ai du mal à le différencier (dans le comportement j'entends) de l'anxieux, de l'agité, du paniqué, etc. Du coup, comment reconnaître un angoissé ? Est-ce que cela peut seulement se repérer ? Comment donc les soigner ? Par des médicaments ? J'ai du mal à y croire. Par une thérapie ? Je suis sceptique sur ce genre de choses.


Concernant la folie, effectivement, la définir me semble difficile. De plus, on utilise aujourd'hui tellement ce mot qu'on ne sait plus ce qu'il signifie. Qui est réellement fou ? Et comment l'angoisse peut mener à la folie ? La névrose joue-t-elle un rôle ?


Désolé de vous assaillir de questions ainsi, mais je les écris en même temps qu'elles traversent ma pensée.
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