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L'homme et ses dieux.

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Liber
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descriptionL'homme et ses dieux. - Page 5 EmptyRe: L'homme et ses dieux.

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Aristippe de cyrène a écrit:
Liber a écrit:
Spinoza croit encore en Dieu.

Certainement pas. Spinoza ne croit pas, il connaît.

Si vous voulez, peu importe après tout, cela ne change rien au fait qu'il y a encore un Dieu dans sa philosophie. Spinoza n'est pas athée. Comparez le Traité théologico-politique à l'Antéchrist et sa loi contre le christianisme.

Il reste en quelque sorte prisonnier du Dieu dont il essaye de se libérer.

Nietzsche n'a pas eu besoin de Dieu pour sa philosophie, contrairement à Spinoza.

Liber a écrit:
On date d'un texte de Hegel cette prise de conscience que "Dieu lui-même est mort".

N'est-ce pas Kant qui exprime cette idée en premier quand, parlant de l'impératif catégorique, il se rend compte qu'il a tué Dieu ?

Où vous avez trouvé cette idée chez Kant ?

Liber a écrit:
Je ne vois pas où vous voyez ça. Que ce soit l'Antéchrist ou la dissertation n°3 de la Généalogie de la morale, on n'y aperçoit que critiques contre la religion.

En effet oui. Mais lorsque j'évoquais ce respect, je ne pensais nullement le trouver dans son œuvre, mais plutôt dans sa vie.

descriptionL'homme et ses dieux. - Page 5 EmptyRe: L'homme et ses dieux.

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Il y a tout de même un art d'écrire chez Spinoza, à en croire Leo Strauss, qui contraint à ne pas dévoiler son jeu sous peine de prêter le flanc à la persécution - ce qui eut lieu malgré tout parce que les philosophes de l'époque, quoique pleins des préjugés de leur milieu à forte propension chrétienne et mésinterprétant Spinoza, peut-être à dessein politique, savaient lire entre les lignes, en tout cas beaucoup plus que nous qui oublions le contexte historique (même si, au demeurant, il ne peut tout expliquer) et mettons trop rapidement tout dans le même panier. M'est avis que Nietzsche, s'il avait vécu au XVIIe siècle, aurait fait preuve de plus de subtilité et aurait pris un masque différent de celui qu'il prit (il est vrai qu'il y a aussi un certain art d'écrire chez Nietzsche) et plus en accord, en apparence, avec ce qu'il combattait. Même si Nietzsche a toujours été ouvertement terrible envers son époque (cf. Considérations inactuelles), il apparaît de plus en plus en première ligne du front, jusqu'à tirer à boulets rouges sur le christianisme (cf. l'Antéchrist). Il est clairement en position frontale et offensive. Mais le champ de bataille a depuis longtemps été occupé et Nietzsche n'est pas le plus original, il est celui qui parle le plus fort avec le moins de précautions. Que pouvait-il craindre en matière de représailles, sinon une mauvaise presse ? Il ne fut d'ailleurs pas connu de son vivant (vie consciente ; même s'il y eut un retentissement relatif de la Naissance de la tragédie et de la première Inactuelle - qui, pour l'anecdote, introduisit dans la langue allemande l'expression couramment utilisée depuis de "philistin de la culture") et sera célébré de manière posthume par la société allemande. Spinoza, lui, vivait dans une époque troublée, politiquement instable, conflictuelle et divisée religieusement. Il connut, lui, les menaces réelles et les atteintes à sa vie. Par ailleurs, le christianisme apparaît chez lui comme un moyen d'éduquer le peuple inapte à la raison, du moins à la raison des philosophes. Certains enseignements religieux permettent d'apporter quelques lumières semblables à celles de la raison. Peut-être peut-on y voir un platonisme à destination du peuple, de la même manière que Nietzsche, à sa façon, reconnaissait l'importance du christianisme pour le plus grand nombre.

Quant aux fêtes, notamment Noël, elles permettent de prendre la mesure du temps, en s'y positionnant, et de l'éternité, c'est-à-dire de revenir sur notre existence (passée), de prendre conscience du présent et de son rapport à l'éternité, enfin de ce qui s'ouvre à nous.

descriptionL'homme et ses dieux. - Page 5 EmptyRe: L'homme et ses dieux.

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Aristippe de cyrène a écrit:
Liber a écrit:
Spinoza croit encore en Dieu.

Certainement pas. Spinoza ne croit pas, il connaît. Et il n'y pas chez lui de Dieu comme l'entendent ses contemporains, il y a et il n'y a que la nature. Spinoza est un penseur de l'immanence, non de la transcendance. Le "Dieu" de Spinoza, ou du moins ce qu’il définit sous les mots substance unique, infinie, éternelle, immanente, n’est pas un sujet, mais la nature. Bref il n'y a que la nature, et elle se donne à connaître, point à croire.

Toute la subtilité est là. Car Spinoza est à des kilomètres du croyant, mais a des kilomètres de l'athée aussi.

Ce que je tentais d'expliquer par ce parallèle avec Nietzsche, c'est que Spinoza, par la plénitude de son affirmation, dépasse Dieu.

Prudence toutefois. Il est vrai que la publication posthume de l'Éthique pourrait plaider en faveur de cette hypothèse. Mais il chercha à la publier de son vivant. Toutefois, dire, après avoir passé en revue les manières de caractériser Dieu : "il n'y a que la nature", c'est sortir de Spinoza. Il ne fait pas œuvre de théologien, mais poursuit l'œuvre de Descartes jusqu'à ses conséquences nécessaires. D'une certaine manière, Spinoza, c'est Descartes relu et corrigé (celui des Principes de la philosophie notamment, I, § 13-14 ; § 20 - par exemple), c'est Descartes, s'il avait pu ou osé dire exactement ce qu'il pensait (cf. la condamnation de Galilée, qui l'a vacciné). Spinoza, c'est un cartésien, mais un cartésien conséquent. Or, d'après Descartes, si Dieu seul est substance, il accorde quand même le statut de substance à ce qui n'a besoin que de Dieu pour exister... Le début de l'Éthique établit qu'il n'y a qu'une substance, infinie, etc., dès lors, il n'y a plus de "reste" : tout est dans tout - mais pas réciproquement.

Du coup, tout est tellement rentré "en Dieu" qu'on se demande ce qu'il reste à Dieu. Alors certes, Dieu, c'est la nature, c'est la vie, la nécessité (ce qui agit de soi-même). Mais si Dieu n'est plus le créateur (dans une conception dualiste et transcendantale, le créateur se distingue de sa créature, d'autant plus que si ce n'était pas le cas, sa créature devrait avoir les mêmes qualités que lui ; or, même les néoplatoniciens, plutôt réceptifs aux émanations, aux infusions divines - Dieu est à sa création ce que le thé est à l'eau chaude -, affirment que plus les cercles concentriques de l'émanation divine s'éloignent, et moins les êtres sont parfaits - ce qui est absurde dans une perspective spinoziste), il est le producteur. Il ne crée pas une fois pour toutes (il n'y a pas de genèse, chez Spinoza), il est création (hier, aujourd'hui, demain). Pour nous autres, les modernes, on peut enlever Dieu de l'Éthique, l'œuvre nous semble la même. Mais pour Spinoza ? Enlever Dieu, c'est enlever la vie.

Spinoza distingue nettement philosophie et théologie. Aux philosophes, la raison (qui peut connaître seulement deux attributs de Dieu, qui en a une infinité...) ; aux théologiens la révélation. Il exige seulement que les théologiens s'occupent de la révélation, et laissent les philosophes raisonner.

Deux dernières remarques, nature naturante, nature naturée, etc., ces expressions font leur effet : on n'y trouve pas Dieu. Sauf que Spinoza les reprend telles quelles de Saint Thomas d'Aquin. Ce qui intéresse Spinoza, à l'évidence, c'est de connaître Dieu, du moins de distinguer entre connaître Dieu par la raison, et le connaître par la révélation. Il n'a jamais dit nulle part, ni explicitement laissé entendre qu'il n'y croyait pas. Dieu ne s'est pas révélé à lui, mais lui l'a intellectuellement rendu accessible. Ce qui implique de raser la barbe du Vieux, de lui enlever ses sandales, de lui retirer tous les accessoires anthropocentriques. Du coup, il n'est plus présidentiable, il baisse dans les sondages. C'est moins personnel. Or le dieu des juifs est le dieu le plus personnel qui soit, beaucoup plus, incomparablement plus personnel que le dieu plutôt convivial, assidu dans les fêtes de quartier des chrétiens, et qui accepte de poser patiemment pour l'insupportable Michel-Ange dans la chapelle Sixtine. Si le dieu de Spinoza existe, alors le peuple juif n'est plus le peuple élu. C'est pire que d'être athée, en son temps. Ça lui vaut le herem, si rarement appliqué que la liste des excommuniés ne tiendrait pas sur une demie page.

Aristippe de cyrène a écrit:
Alors que Nietzsche, par sa réfutation (le terme n'est peut-être pas adéquat) ne parvient pas à le dépasser. Il reste en quelque sorte prisonnier du Dieu dont il essaye de se libérer.

Tel que vous le présentez, on a presque affaire à un Nietzsche torturé par une contrition insurmontable, comme s'il regrettait, comme s'il jugeait la mort de Dieu comme un crime. C'est un contresens de bout en bout. Il ne fait pas le deuil de Dieu ; pas plus que Spinoza ne dépasse Dieu, ce qui est absurde, puisque Dieu, c'est la substance.

Liber a écrit:
Liber a écrit:
On date d'un texte de Hegel cette prise de conscience que "Dieu lui-même est mort".

N'est-ce pas Kant qui exprime cette idée en premier quand, parlant de l'impératif catégorique, il se rend compte qu'il a tué Dieu ?

Où vous avez trouvé cette idée chez Kant ?

On ne trouve rien de cela chez Kant.

Silentio a écrit:
M'est avis que Nietzsche, s'il avait vécu au XVIIe siècle, aurait fait preuve de plus de subtilité et aurait pris un masque différent de celui qu'il prit (il est vrai qu'il y a aussi un certain art d'écrire chez Nietzsche) et plus en accord, en apparence, avec ce qu'il combattait. Même si Nietzsche a toujours été ouvertement terrible envers son époque (cf. Considérations inactuelles), il apparaît de plus en plus en première ligne du front, jusqu'à tirer à boulets rouges sur le christianisme (cf. l'Antéchrist). Il est clairement en position frontale et offensive. Mais le champ de bataille a depuis longtemps été occupé et Nietzsche n'est pas le plus original, il est celui qui parle le plus fort avec le moins de précautions. Que pouvait-il craindre en matière de représailles, sinon une mauvaise presse ?

Nietzsche constate la mort de Dieu. Mais Dieu est mort avant. Il en prend acte. C'est là toute la différence. De son temps, la bourgeoisie en est encore à jeter son euro dominical dans le panier de l'enfant de chœur qui circule après la messe, la morale se fait toujours de plus en plus hypocrite, etc. Nietzsche tue la morale, l'écume et la bave du christianisme (de Dieu).

Dernière édition par Euterpe le Mer 27 Juil 2016 - 13:09, édité 1 fois

descriptionL'homme et ses dieux. - Page 5 EmptyRe: L'homme et ses dieux.

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Ceux qui utilisent dieu pour montrer le droit chemin ne sont pas les Héros qui font preuve d'abnégation pour essayer de ralentir la diabolisation de la population égoïste... Alors dieu ne serait peut-être qu'une invention par des personnes très, très bonnes qui voulaient seulement faire partager de vraies valeurs pour empêcher les abus, les guerres...
Que pensez-vous de cette théorie ?

descriptionL'homme et ses dieux. - Page 5 EmptyRe: L'homme et ses dieux.

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Collegienmv a écrit:
Ceux qui utilisent dieu pour montrer le droit chemin ne sont pas les Héros qui font preuve d'abnégation pour essayer de ralentir la diabolisation de la population égoïste... Alors dieu ne serait peut-être qu'une invention par des personnes très, très bonnes qui voulaient seulement faire partager de vraies valeurs pour empêcher les abus, les guerres...
Que pensez-vous de cette théorie ?

Elle disparaîtra d'elle-même, ne vous inquiétez pas.
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