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Sociétés historiques et sociétés naturelles.

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4 participants

descriptionSociétés historiques et sociétés naturelles. - Page 5 EmptyRe: Sociétés historiques et sociétés naturelles.

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Euterpe a écrit:
Vous ne soupçonnez pas à quel point penser c'est être contrarié.

Je crains que vous ne vous soyez mieux présenté là qu'à la ligne précédente, Euterpe.
J'approuve avec vous l'utilisation de l'insatisfaction comme moteur de nos actes, mais il faut savoir la gérer.
Trop de "non" sans argumentation dans ce post, qui devient peu constructif.
Je ne pensais pas devoir expliquer la différence entre croyance et théorie scientifique.
Je préfère vous lire quand vous parlez de l'histoire de la philosophie, que vous possédez remarquablement.

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tomefringant a écrit:
Je ne pensais pas devoir expliquer la différence entre croyance et théorie scientifique.
Est-ce que Paul Feyerabend vous intéresse, ou Lakatos, ou même Kuhn ? Ils sont très instructifs sur la question des fondements de toute théorie scientifique. Aucune, sans exception, n'échappe aux croyances, quant à ses fondements. Or, je le répète, le danger vient précisément de ce que beaucoup trop de représentants de la science moderne sont convaincus qu'elle est exempte de toute croyance. Nietzsche, encore, me paraît d'une actualité criante dans ce qu'il en dit.

Quant à votre impression d'un post qui peine à se révéler constructif, il ne s'explique pas par les multiples contestations que je vous adresse, mais par une question de terminologie. Vous employez des termes qui vous semblent évidents parce que vous avez sans doute l'habitude de les employer tels quels. Mais ils perdent toute évidence dans le champ de la philosophie, où le travail de conceptualisation, plus qu'ailleurs, est vital, car la nuance y est requise partout. Si vous précisez à chaque fois ce que vous entendez par tel ou tel des vocables que vous employez, la difficulté sera levée.

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Feyerabend, bien qu'il soit considéré comme un radical, ne critiquait pas la démarche scientifique, mais les règles méthodologiques immuables. Son souhait était de faire échapper la science à l'immobilisme, parce que les chercheurs parvenus à un grand pouvoir social tendent à "momifier" les règles qu'ils ont utilisées. La cible est donc un mésusage de la démarche scientifique et non la démarche elle-même.
Ce qui différencie la croyance de la théorie scientifique est la capacité de prédire : l'astrophysique réussit là où l'astrologie échoue. Une théorie valide doit être réfutable… mais pas réfutée. Tant que la théorie indique un moyen d'être réfutée, mais que ce moyen n'est pas encore réalisable techniquement, elle est dans un no man's land : Pas une croyance, puisqu'elle est réfutable, mais pas validée non plus. Ce no man's land n'est pas une zone anti-scientifique : c'est lui que Feyerabend voulait revaloriser, et je l'approuve entièrement.
J'écris dans "Sous acide" :
Le progrès scientifique naît d'un hasard
considéré avec rigueur.
Le scientifique pointilleux,
parvenu seulement à la moitié du chemin,
devrait s'autoriser quelques idées bizarres.

Ç'aurait pu être écrit par Feyerabend, que je ne connaissais pas à l'époque : il militait pour la spontanéité et les idées décalées en science. Mais à vrai dire, les vrais inventeurs n'ont pas besoin d'être encouragés.
Situées dans le no man's land: l'ostéopathie, non validée par la médecine fondée sur les preuves, mais ses résultats ne sont pas des croyances. La théorie des supercordes et la théorie M unificatrice fondent les espoirs des physiciens alors qu'on est très loin de leur vérification expérimentale.
Le "Contre la méthode" de Feyerabend date déjà des années 70 et le monde scientifique a déjà beaucoup évolué depuis, certainement parce que certains l'ont écouté.

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tomefringant a écrit:
Feyerabend, bien qu'il soit considéré comme un radical, ne critiquait pas la démarche scientifique, mais les règles méthodologiques immuables.
Il va beaucoup plus loin. On pourrait citer pratiquement tout son livre. Je ne citerai que le passage suivant, qui montre que la démarche scientifique elle-même, telle qu'on la connaît et telle qu'elle trouve à s'exercer depuis plusieurs siècles, est remise à sa place, dans une perspective ouverte et beaucoup plus large, grâce à son approche comparatiste face à laquelle une réfutation digne de ce nom serait un défi que peu oseraient relever.

Paul Feyerabend, Contre la méthode a écrit:
Ainsi, la science est beaucoup plus proche du mythe qu'une philosophie scientifique n'est prête à l'admettre. C'est l'une des nombreuses formes de pensée qui ont été développées par l'homme, mais pas forcément la meilleure. La science est indiscrète, bruyante, insolente ; elle n'est essentiellement supérieure qu'aux yeux de ceux qui ont opté pour une certaine idéologie, ou qui l'ont acceptée sans avoir jamais étudié ses avantages et ses limites. Et comme c'est à chaque individu d'accepter ou de rejeter des idéologies, il s'ensuit que la séparation de l'État et de l'Église doit être complétée par la séparation de l'État et de la Science : la plus récente, la plus agressive et la plus dogmatique des institutions religieuses. Une telle séparation est sans doute notre seule chance d'atteindre l'humanité dont nous sommes capables, mais sans l'avoir jamais pleinement réalisée.

p. 332, chapitre 18.


Dans la science, attaquer les idées fondamentales provoque des réactions de tabou qui ne sont pas plus faibles que celles des sociétés dites primitives. [...]. Et la science n'est pas davantage prête à faire du pluralisme théorique le fondement de la recherche. [...].
Mais [la science et le mythe] sont encore plus proches. Le dogmatisme massif que j'ai décrit n'est pas seulement un fait, il a une fonction très importante : la science serait inconcevable sans lui. Les penseurs "primitifs" savaient mieux comprendre la nature de la connaissance que leurs rivaux, les philosophes "éclairés". Il est donc nécessaire de revoir notre attitude envers le mythe, la religion, la magie, la sorcellerie, et toutes ces idées que les rationalistes voudraient voir disparaître de la surface de la Terre (sans même les avoir tant soit peu regardées — ce qui constitue une réaction tabou typique).

pp. 335-336.


tomefringant a écrit:
La cible est donc un mésusage de la démarche scientifique et non la démarche elle-même.
Peut-être avez-vous lu le livre il y a longtemps, car vous n'en avez pas un souvenir correct. La démarche scientifique est remise à sa place : dans le cadre de toute démarche de connaissance. C'est cela qui permet à Feyerabend de se livrer à une étude comparée de la science. Vous faites même un contresens, pas moins, en disant qu'il vise un mésusage de la démarche scientifique, car la thèse de Feyerabend consiste précisément à dire qu'il ne faut aucune règle (théorie anarchiste de la connaissance, c'est du reste le sous titre de son opus). C'est la fameuse thèse du "tout est bon", qu'il explicite dans un chapitre qui précède celui dont je vous cite un passage.

tomefringant a écrit:
Ce qui différencie la croyance de la théorie scientifique est la capacité de prédire : l'astrophysique réussit là où l'astrologie échoue.
L'épistémologie a déjà corrigé cette croyance dans les années 70. Les prédictions scientifiques et les autres, se situent sur des plans différents, et sont tout aussi rationnelles. Pour en avoir un aperçu synthétique et commode, le mieux est encore d'aller voir du côté de Raymond Boudon, qui multiplie les exemples et propose de nombreuses références.

tomefringant a écrit:
Une théorie valide doit être réfutable… mais pas réfutée. Tant que la théorie indique un moyen d'être réfutée, mais que ce moyen n'est pas encore réalisable techniquement, elle est dans un no man's land : Pas une croyance, puisqu'elle est réfutable, mais pas validée non plus. Ce no man's land n'est pas une zone anti-scientifique : c'est lui que Feyerabend voulait revaloriser, et je l'approuve entièrement.
Vous me semblez bien plus proche de Popper (j'allais dire de l'Église popperienne) que de Feyerabend, ici.

tomefringant a écrit:
ses résultats ne sont pas des croyances. La théorie des supercordes et la théorie M unificatrice fondent les espoirs des physiciens alors qu'on est très loin de leur vérification expérimentale.
Je ne parle pas des résultats, mais des fondements, des a priori.

descriptionSociétés historiques et sociétés naturelles. - Page 5 EmptyRe: Sociétés historiques et sociétés naturelles.

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Rappelons que ce livre devait être au départ un débat entre Feyerabend et un partisan de la science "dure" dont je ne me souviens plus du nom. Ce dernier est, je crois, décédé avant la fin du projet, et Feyerabend a décidé de publier telle quelle son argumentation, qui était, de ce fait, très radicalisée. Je dis ceci parce que je pense qu'il n'était pas idiot mais voulait par cette méthode secouer la pesante prétention scientifique installée à l'époque, au point de forcer le trait. Il y aurait certainement plus à dire de sa psychobiographie.
Et les extraits que vous publiez sont représentatifs : "la plus agressive et la plus dogmatique des institutions religieuses"… la science n'a jamais brûlé personne sur un bûcher, ses adversaires si… Ce Feyerabend excessif a à l'évidence pour cible les zélotes de la science et non la démarche scientifique, comme je le disais précédemment.
Dans le même genre, prenez Illitch, autre pourfendeur des excès de la science avec "Nemesis médicale". Le lecteur même averti ne peut être que convaincu par son argumentation lumineuse. Pourtant lui-même, 20 ans plus tard, dans des conférences sur le même sujet, avouait s'être trompé de cible et que le vrai coupable était la sacralisation de la vie, concept fort religieux et très peu scientifique.
Prudence avec les "anti". Les Croisés sont nécessaires, mais partir en croisade c'est dépasser l'équilibre.

S'il ne faut aucune règle dans la connaissance… ne faisons pas de philosophie. Et ne communiquons même pas. Ce serait en pure perte en l'absence de références.
Je vous laisse trouver toutes les règles que Feyerabend a utilisé pour écrire son argumentation… anarchique.
On peut s'appeler Feyerabend, ou Kant, ou même Nietzsche, et se tromper…
Je pense souvent à tous les penseurs plus sincères parce qu'ils relativisaient davantage l'ambition et qui n'ont jamais eu de velléité de publication.
Je mettrais à vrai dire Nietzsche dans ce lot puisqu'il a eu du mal à se faire lire et éditer. Cela laisse imaginer tous ceux qui sont restés dans l'ombre parce qu'ils n'ont jamais eu la moindre prétention.

Enfin, un croyant se considère toujours comme parfaitement rationnel.
C'est mieux quand c'est l'univers qui le dit.
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