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La théorie sur la conscience de Dehaene en question

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descriptionLa théorie sur la conscience de Dehaene en question - Page 10 EmptyRe: La théorie sur la conscience de Dehaene en question

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PhiPhilo a écrit:
Eh bien moi pas. Pour la n^ième fois, les sciences de la nature ne peuvent pas décrire une expérience qualitative, sauf à prétendre la quantifier, ce qui est le comble du ridicule !


Oublions un peu la Science avec un grand S et la Philosophie avec un grand P. Voici un verre d’eau chaude. Trempez- y l’index. Vous ne le retirez pas de suite même si l’expérience est dure. L’eau fait 40°. Je fais chauffer l’eau un peu avant d’emplir un nouveau verre. Pas beaucoup plus ; l’eau fait maintenant 41°. Mais je vois à votre visage quand vous trempez l’index que l’expérience est plus pénible. Aux alentours de 43 degrés, sans doute à 44, certainement à 45, vous ne laisserez pas le doigt dans l’eau une seconde. La sensation de brûlure sera devenue intolérable.

Il y a là corrélation entre une quantité de chaleur (celle du verre d’eau) et une intensité de douleur (celle éprouvée au doigt). Donc « quantifier » l’expérience de la douleur, ce n’est pas ridicule puisque je puis établir un lien direct, matériel, observable entre une intensité de douleur éprouvée et une quantité d’énergie « stimulante ».

Qu’allez-vous me dire maintenant ? Que cette douleur éprouvée n’est pas un qualia, n’est pas une expérience purement subjective, qu’elle n’est pas de l’ordre de l’affectivité ? Quelle monstruosité encore ?

Dans la phrase que je reproche à Dehaene, il y a un mot que je ne lui reproche pas d’employer, c’est le mot « quanta ». « Dans quelques décennies, la notion-même de qualia, ces quanta d’expérience pure...sera considérée comme une chose étrange. » Ce que Dehaene tourne en ridicule ici c’est effectivement l’existence de réalités psychiques quantifiables. Pour moi comme pour lui, tout qualia est un quanta, toute réalité subjective est faite de réalités quantifiables. Ce qui n’implique pas bien sûr qu’on ait maintenant ou qu’on puisse jamais avoir les instruments pour la mesurer.

Si la réalité subjective était purement de l’ordre du qualitatif, elle n’aurait pas de substance, elle n’existerait pas. Ce qui m’amuse, c’est de voir avec quel enthousiasme, quelle fougue vous argumentez pour établir que la réalité subjective est purement de l’ordre du qualitatif. Je n’ai même pas besoin de considérer vos arguments, la force avec laquelle vous les soutenez les contredit par avance. Les devoirs pascaliens d’amour, de crainte et de créance sont semblablement de l’ordre de la force sans lesquels ils ne seraient pas devoirs.

Pour le reste, c’est vrai, il n’y a pas dans le subjectif que du quantitatif. Mais au moins dans le « modulisme », j’ai essayé de montrer qu’on peut réduire la diversité apparente des qualités en considérant les combinaisons dans le temps d’affects premiers. Que dans ces affects premiers, il y ait une part de qualité irréductible, c’est possible. Mais cela ne change pas pour moi l’essentiel : un affect qui ne nous affecterait pas avec une certaine quantité de force, ce n’est pas une réalité de conscience.

Dernière édition par Vangelis le Jeu 13 Déc 2018 - 12:43, édité 1 fois (Raison : Mise en forme.)

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clément dousset a écrit:
Il y a là corrélation entre une quantité de chaleur (celle du verre d’eau) et une intensité de douleur (celle éprouvée au doigt). Donc « quantifier » l’expérience de la douleur, ce n’est pas ridicule puisque je puis établir un lien direct, matériel, observable entre une intensité de douleur éprouvée et une quantité d’énergie « stimulante ».

Qu’allez-vous me dire maintenant ? Que cette douleur éprouvée n’est pas un qualia, n’est pas une expérience purement subjective, qu’elle n’est pas de l’ordre de l’affectivité ? Quelle monstruosité encore ?


Dans votre exemple il y a un biais et une erreur.
Le biais est de présenter la douleur ressentie comme un qualia alors qu'elle ne le sera (si jamais cela existe) qu'a posteriori, i.e. une fois que la main sera retirée de l'eau, donc après l'expérience et non pendant.
Ce biais repose sur l'erreur que la conscience de la douleur vous ferait retirer la main de l'eau alors que c'est une réponse de l'arc réflexe. Le schéma est le suivant : Stimulus -> Moelle épinière -> Muscles de la main et du bras. Le cerveau et la conscience ne sont stimulés qu'à minima dans cette fonction car cela se joue au niveau de la moelle épinière entre un neurone sensitif pour l'information et un motoneurone pour la réponse.

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Oublions un peu la Science avec un grand S et la Philosophie avec un grand P.


Jusque là, le débat avait une certaine tenue sans doute en partie parce qu'elle opposait une certaine conception de la science (avec ou sans majuscule) à une certaine conception de la philosophie (avec ou sans majuscule). Si, à présent, il s'agit d'échanger des propos de café du commerce, libre à vous, mais très peu pour moi, merci ! Perso, je continue à faire de la philosophie, plus précisément dans ma spécialité universitaire, à savoir l'épistémologie. Ce qui, sur un forum qui proclame dans sa charte que "le forum du site n'est pas un forum d'opinion, mais de philosophie" n'a rien de particulièrement choquant, n'est-ce pas ?

Voici un verre d’eau chaude. Trempez- y l’index. Vous ne le retirez pas de suite même si l’expérience est dure. L’eau fait 40°. Je fais chauffer l’eau un peu avant d’emplir un nouveau verre. Pas beaucoup plus ; l’eau fait maintenant 41°. Mais je vois à votre visage quand vous trempez l’index que l’expérience est plus pénible. Aux alentours de 43 degrés, sans doute à 44, certainement à 45, vous ne laisserez pas le doigt dans l’eau une seconde.


O.K. Maintenant, vous substituez à mon index comme objet d'expérimentation 1) un pain de beurre, 2) une tige de jonquille. Allez-vous conclure que
La sensation de brûlure sera devenue intolérable.

Il y a là corrélation entre une quantité de chaleur (celle du verre d’eau) et une intensité de douleur (celle éprouvée au doigt). Donc « quantifier » l’expérience de la douleur, ce n’est pas ridicule puisque je puis établir un lien direct, matériel, observable entre une intensité de douleur éprouvée et une quantité d’énergie « stimulante ».

Autrement dit, de ce que vous pouvez, effectivement, "établir un lien direct, matériel, observable" entre le comportement de l'objet d'expérimentation et "une quantité d'énergie "stimulante", allez-vous inférer que le pain de beurre ou la tige de jonquille 1) éprouvent une "sensation de brûlure devenue intolérable", 2) que l'un et/ou l'autre sont conscients de ladite "sensation" ?

Encore une fois, comment faites-vous pour passer de l'observable (le changement d'état de l'objet d'expérimentation) à l'inobservable (le quale, voire la conscience) ? Si vous faites de la philosophie, pas de problème : il suffit de faire une abduction, c'est-à-dire de postuler l'inobservable à titre de prémisse métaphysique nécessaire à la poursuite de l'argumentation. Mais si vous faites de la science (ce à quoi vous aspirez, si je vous ai bien compris), vous ne pouvez faire usage que de la déduction pour construire vos hypothèses et de l'induction pour les vérifier ou les réfuter. Alors quel parti prenez-vous ?

Bref, Vangelis est pleinement fondé à vous objecter que 
Dans votre exemple il y a un biais et une erreur.
Le biais est de présenter la douleur ressentie comme un qualia alors qu'elle ne le sera (si jamais cela existe) qu'a postériori, i.e. une fois que la main sera retirée de l'eau, donc après l'expérience et non pendant.
Ce biais repose sur l'erreur que la conscience de la douleur vous ferait retirer la main de l'eau alors que c'est une réponse de l'arc réflexe. Le schéma est le suivant : Stimulus -> Moelle épinière -> Muscles de la main et du bras. Le cerveau et la conscience ne sont stimulés qu'à minima dans cette fonction car cela se joue au niveau de la moelle épinière entre un neurone sensitif pour l'information et un motoneurone pour la réponse.


J'ajouterai que vous commettez deux autres inconséquences épistémologiques lorsque vous parlez de "corrélation entre une quantité de chaleur et une intensité de douleur"
1) la corrélation est un concept statistique dans le sens où on ne peut corréler que des séries de variables et non pas des phénomènes isolés, ce qui veut dire que vous devez réaliser un nombre significatif de mesures en faisant varier les contextes pour éliminer le maximum de biais, le problème étant, en l'occurrence, que
2) si la quantité de chaleur est mesurable donc quantifiable, l'intensité de douleur ne l'est pas : il n'existe pas de ponomètre et il ne peut (au sens d'une impossibilité logique) en exister puisqu'il s'agit là, typiquement, d'un quale, c'est-à-dire d'une expérience subjective non factuelle (que Thomas Nagel définit par la locution "what is it like to ...").

Je n’ai même pas besoin de considérer vos arguments. 


Pour ma part, je continuerai inlassablement à considérer et à combattre les vôtres, c'est-à-dire ceux de Dehaene. Parce qu'au fond, vous êtes aussi scientiste que lui quoique, probablement, pas pour les mêmes motifs.

La force avec laquelle vous les soutenez les contredit par avance


Tandis que la "force" avec laquelle vous soutenez les vôtres vaut, bien entendu, preuve irréfutable de leur validité.

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Vangelis a écrit:
Dans votre exemple il y a un biais et une erreur.
Le biais est de présenter la douleur ressentie comme un qualia alors qu'elle ne le sera (si jamais cela existe) qu'a postériori, i.e. une fois que la main sera retirée de l'eau, donc après l'expérience et non pendant.
Ce biais repose sur l'erreur que la conscience de la douleur vous ferait retirer la main de l'eau alors que c'est une réponse de l'arc réflexe. Le schéma est le suivant : Stimulus -> Moelle épinière -> Muscles de la main et du bras. Le cerveau et la conscience ne sont stimulés qu'à minima dans cette fonction car cela se joue au niveau de la moelle épinière entre un neurone sensitif pour l'information et un motoneurone pour la réponse.


L'arc réflexe peut jouer bien sûr. Il jouera certainement si le stimulus nociceptif intervient par surprise, lors d'un contact fortuit par exemple. Mais il ne peut jouer dans le cadre de l'expérience que je suggère. Là le doigt de l'interlocuteur P à convaincre s'enfonce successivement dans des verres d'eau chaude dont la température s'échelonne de façon très progressive. P ne va pas retirer son doigt du verre avant d'éprouver un ressenti, surtout s'il veut convaincre que l'intensité du ressenti ne sera pas la cause qui l'en fera retirer. Et lorsqu'il retirera enfin son doigt, ça a beaucoup plus de chance d'être parce que le sentiment sera devenu trop fort pour être supportable que parce qu'il n'existera pas du tout. Au moment de retirer son doigt, il aura autant qu'immédiatement après un ressenti douloureux dont il me paraît pertinent de dire qu'il est un qualia et qu'on peut le décrire, au moins en partie, en terme de quantité et que cette quantité est en rapport avec la température de l'eau au même moment.

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PhiPhilo a écrit:
O.K. Maintenant, vous substituez à mon index comme objet d'expérimentation 1) un pain de beurre, 2) une tige de jonquille. Allez-vous conclure que
La sensation de brûlure sera devenue intolérable.

Il y a là corrélation entre une quantité de chaleur (celle du verre d’eau) et une intensité de douleur (celle éprouvée au doigt). Donc « quantifier » l’expérience de la douleur, ce n’est pas ridicule puisque je puis établir un lien direct, matériel, observable entre une intensité de douleur éprouvée et une quantité d’énergie « stimulante ».




Bon, j'avoue que j'ai présenté l'expérience supposée des verres d'eau chaude de façon un peu cavalière et qui a pu vous paraître déplaisante. Je vous prie donc de bien vouloir m'excuser. Ce n'est pas pour autant que je comprends cette réplique qui me paraît saugrenue. je sais très bien qu'il n'existe pas d'expériences pour mesurer exactement, précisément la douleur. Je sais d'ailleurs que toute expérience sur la mesure de la douleur peut poser des problèmes éthiques. Mais je sais aussi que ce n'est pas parce que ces expériences de mesures précises n'existent pas que la douleur ne peut pas être mesurée. Il existe dans les hôpitaux une échelle graduée de 1 à 10 qui permet au personnel soignant d'évaluer la douleur à partir  de réponses à des questions posées au patient ou de symptômes si le patient ne peut s'exprimer. Si vous pensez que la douleur ne peut se décrire que qualitativement, je vous laisse à votre point de vue.
Vous considérez que les qualia sont uniquement des expériences qualitatives: soit!
Mon point de vue, différent, se résume ici :
"Pour le reste, c’est vrai, il n’y a pas dans le subjectif que du quantitatif. Mais au moins dans le « modulisme », j’ai essayé de montrer qu’on peut réduire la diversité apparente des qualités en considérant les combinaisons dans le temps d’affects premiers. Que dans ces affects premiers, il y ait une part de qualité irréductible, c’est possible. Mais cela ne change pas pour moi l’essentiel : un affect qui ne nous affecterait pas avec une certaine quantité de force, ce n’est pas une réalité de conscience."
et se développe dans le message où j'expose ma conception du modulisme.

Cordialement

CD

Dernière édition par Vangelis le Jeu 13 Déc 2018 - 17:27, édité 1 fois (Raison : Mise en forme.)
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