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Quel est le rôle de l'histoire ? Est-il de rapporter des faits ou de les raconter ?

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3 participants

descriptionQuel est le rôle de l'histoire ? Est-il de rapporter des faits ou de les raconter ? EmptyQuel est le rôle de l'histoire ? Est-il de rapporter des faits ou de les raconter ?

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Alors que j'étais en pleine révision d'histoire sur la Révolution française, je suis tombé sur un texte parlant de la façon dont la Révolution que nous célébrions le 14 juillet n'était pas celle du peuple mais un coup d'État bourgeois.
Sans remettre en cause politiquement cet épisode de notre histoire, je me suis posé la question : devons-nous écrire une histoire qui soit véritablement avérée (rapporter des faits) ou bien une version romancée (raconter, j'insiste sur le conte) ?

En sachant bien entendu que l'histoire est souvent amplifiée voire modifiée. Quel est le rôle de l'histoire ? Est-il de nous rappeler les atrocités et de nous informer des dangers de mouvements comme le fascisme ? En sachant qu'en Allemagne de l'Ouest, ce dernier point a traumatisé une génération.
Ou bien est-il de nous procurer réconfort et inspiration ? Je pense notamment par exemple à l'histoire française. Lorsque par exemple nous étudions la Révolution française, doit-on soutenir la version romantique des choses ou bien doit-on apprendre la version historiquement vraie ?
Il y a le risque de voir l'histoire de chaque nation refléter son amour-propre et peut-être, je ne pense offenser aucun ressortissant de ce pays ici mais je m'abstiendrai de le nommer, finir par apprendre que notre président a gagné 10.000 batailles à cheval. Néanmoins, si nous poussons l'autre vice trop loin alors où devrions-nous trouver nos exemples ? Doit-on apprendre que Victor Hugo a été exilé loin de son pays mais qu'il n'a cessé d'écrire pour défendre ses idées, ou bien qu'il a quitté sa vie publique en France et a vécu un exil relativement agréable dans un manoir ?
Pour conclure, on pourrait opposer le chroniqueur, qui relèverait les faits uniquement, au conteur qui rapporterait des mythes pas souvent vrais mais plus proches de ce que les gens veulent et ont besoin d'entendre.

Actuellement, mon manuel d'histoire est au "milieu" de tout cela même si le chapitre sur la décolonisation est court (aucune mention de Madagascar bien que les "événements" d'Algérie soient reconnus et assumés dans une certaine mesure).

descriptionQuel est le rôle de l'histoire ? Est-il de rapporter des faits ou de les raconter ? EmptyRe: Quel est le rôle de l'histoire ? Est-il de rapporter des faits ou de les raconter ?

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Aubier a écrit:
Alors que j'étais en pleine révision d'histoire sur la Révolution française, je suis tombé sur un texte parlant de la façon dont la Révolution que nous célébrions le 14 juillet n'était pas celle du peuple mais un coup d'État bourgeois. Sans remettre en cause politiquement cet épisode de notre histoire, je me suis posé la question : devons-nous écrire une histoire qui soit véritablement avérée (rapporter des faits) ou bien une version romancée (raconter, j'insiste sur le conte) ?

C’est un problème épistémologique. Depuis Thucydide le problème de l’objectivité est fondamental. Le fait devient majeur, et l’historien a pour rôle de le rendre intelligible dans la masse d’événements qu’il a à disposition.

Aubier a écrit:
En sachant bien entendu que l'histoire est souvent amplifiée voire modifiée. Quel est le rôle de l'histoire ? Est-il de nous rappeler les atrocités et de nous informer des dangers de mouvements comme le fascisme ? En sachant qu’en Allemagne de l'Ouest, ce dernier point a traumatisé une génération.
Ou bien est-il de nous procurer réconfort et inspiration ?

La fonction de l’Histoire c’est d’être « maîtresse de vie » (Cicéron). Seriez-vous réconforté d’ignorer la seconde guerre mondiale ? « Bienheureux les simples d’esprits » en somme.

Aubier a écrit:
Je pense notamment par exemple à l'histoire française. Lorsque par exemple nous étudions la Révolution française, doit-on soutenir la version romantique des choses ou bien doit-on apprendre la version historiquement vraie ?

Encore une fois, la version romantique, j’imagine celle d’un peuple qui fait corps, prend conscience de lui-même face à l’absolutisme, que vous apporte-t-elle ? Une vision déformée qui ne peut que déformer vos jugements.

Aubier a écrit:
Il y a le risque de voir l'histoire de chaque nation refléter son amour-propre et peut-être, je ne pense offenser aucun ressortissant de ce pays ici mais je m'abstiendrais de le nommer, finir par apprendre que notre président a gagné 10.000 batailles à cheval.
Néanmoins, si nous poussons l'autre vice trop loin alors où devrions-nous trouver nos exemples ?

Vous parlez de fierté nationale. N’y a-t-il pas lieu de s’enorgueillir quand l’Histoire le permet ? Ce qui est risqué c’est la déformation, le dévoiement d’un événement pour grandir une nation, les totalitarismes fournissent les exemples les plus frappants.

Aubier a écrit:
Pour conclure, on pourrait opposer le chroniqueur, qui relèverait les faits uniquement, au conteur qui rapporterait des mythes pas souvent vrais mais plus proches de ce que les gens veulent et ont besoin d'entendre.

Vous opposez deux manières de faire de l’Histoire, sans peut-être le savoir. D’une part la chronique médiévale, qui est loin de simplement relater des faits. Bien au contraire. Les chroniques ecclésiastiques justifient les écrits saints.

Le mythe antique ne relate pas ce que les gens veulent entendre (vous transposez votre interprétation) mais ce que les gens croient. Pour Tite-live le mythe fait partie de l’histoire puisqu’il participe à la compréhension de l’essor de Rome. La manière d’écrire l’histoire dépend des époques, et il faut vous souvenir qu’un auteur a une visée (politique par exemple) qui va influencer son discours. La neutralité si j’ose dire, est bien souvent relative, même chez les auteurs contemporains.

Aubier a écrit:
Actuellement, mon manuel d'histoire est au "milieu" de tout cela même si le chapitre sur la décolonisation est court (aucune mention de Madagascar bien que les "événements" d'Algérie soient reconnus et assumés dans une certaine mesure).

Pensez aussi au fait que vous disposez d’un programme. Qu’il ne soit pas exhaustif est bien normal. On pourrait débattre de sa teneur, mais ce n’est pas le sujet. Si l’Histoire vous passionne, je vous engage à vous tourner vers une Université d’Histoire. Ce sont des études d’une extrême richesse.

Dernière édition par invité1899 le Dim 2 Juin 2013 - 11:13, édité 1 fois

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Je vois mes erreurs et je m'en excuse. Ma question aurait pu être posée autrement.
Doit-on embellir l'histoire ?

Je m'interroge sur plusieurs points de votre réponse, pouvez-vous éclairer ma lanterne ?
-> Avec tous les problèmes posés par un fait, qui peut être interprété de mille façons, le rendre intelligible signifie-t-il lui donner un contexte et dans ce cas-là ce contexte est une création de l'historien, il n'est pas véridique ?
-> Où est-ce que le terme "Maîtresse de vie" a été employé et quel est le sens ? Je pense à "guide", à moins que la traduction maîtresse concerne l'amante toujours présente dans l'esprit ?
-> Doit-on s'inspirer du courage de nos aïeux, quitte à modifier l'histoire pour coller avec notre fantasme de la Liberté guidant le peuple ? Ou bien doit-on apprendre le pourquoi du comment, aussi "froid" cela soit-il ?
-> L'historien a donc pour devoir de rester neutre ?

Je suis sûr que je vais paraître bien sot en posant ces questions mais tant pis.

PS : Une idée d'ouvrage (idéalement deux) pour creuser la question ?

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Aubier a écrit:
Je vois mes erreurs et je m'en excuse. Ma question aurait pu être posée autrement. Doit-on embellir l'histoire ?

Dans quel but ? C’est là la question fondamentale. Quel est le but de l’Histoire ?

Aubier a écrit:
-> Avec tous les problèmes posés par un fait qui peut être interprété de mille façons, le rendre intelligible signifie-t-il lui donner un contexte et dans ce cas-là ce contexte est une création de l'historien, il n'est pas véridique ?

L’Histoire est une création de l’Homme, c’est un discours. En cela elle porte des imperfections inhérentes à la condition d’homme ; l’inexactitude en fait partie. D’autre part, les sources lacunaires (je pense à l’antiquité notamment) rendent la reconstruction complexe et l’interprétation hasardeuse.
Il arrive que l’hypothèse soit plus souvent la règle que la certitude. Puis le contexte d’écriture propre à l’auteur va (quoi que nous fassions) le déterminer. Dans le cas d’historiens engagés politiquement (Michelet, Duby…) c’est encore plus flagrant. Cela n’ôte rien à la finesse des interprétations mais doit pousser le lecteur à la prudence. Enfin, nous ne touchons qu’aux aspects pratiques. Peut-être espériez-vous une réponse plus « conceptuelle ».

Aubier a écrit:
-> Où est-ce que le terme "Maîtresse de vie" a été employé et quel est le sens ? Je pense à guide à moins que la traduction maîtresse concerne l'amante toujours présente dans l'esprit ?

C’est bien guide, ou enseignante qu’il fallait comprendre. Pour Cicéron le présent doit prendre modèle sur le passé. Je vais essayer d’étayer mon propos précédant relatif au contexte. Si Cicéron dit cela, c’est qu’il faut y voir un contexte double : la crise de la République romaine (qui débute dès 146 av J-C avec la chute de Carthage), et l’influence du stoïcisme qu’il a étudié.

Aubier a écrit:
-> Doit-on trouver inspirant le courage de nos aïeux quitte à modifier l'histoire pour coller avec notre fantasme de la Liberté guidant le peuple ? Ou bien on doit apprendre le pourquoi du comment, aussi "froid" que cela soit ?

Le courage de modifier l’Histoire ? Certains seraient à deux doigts de crier au complot. Encore une fois, que gagneriez-vous à fantasmer tel ou tel événement historique ?

Aubier a écrit:
-> L'historien a donc pour devoir de rester neutre ?

Il a le devoir d’essayer. Dans le cas contraire, il tomberait dans l’idéologie, c’est-à-dire la défense d’une image, d’un groupe. Lorsque l’émotionnel supplante le rationnel. Vous parliez de la Révolution Française et du 14 Juillet. C’est un parfait exemple de débat historique-idéologique : 14 Juillet oui, mais 1789 ou 1793 ? Allait-on accepter la Terreur ?

Aubier a écrit:
PS : Une idée d'ouvrage (idéalement deux) pour creuser la question ?

Paul Veyne, Écrire l’Histoire est pas mal pour commencer.

Dernière édition par invité1899 le Dim 2 Juin 2013 - 11:10, édité 1 fois

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invité 1899, merci d'éditer vos interventions en donnant à vos textes le format normal, pour le confort de lecture de tous. Quand vous faites un copier-coller, le forum modifie le format du texte, je ne sais pas pourquoi. Il faut donc appuyer sur le bouton "basculer le mode édition" et rétablir le texte.

Dernière édition par Euterpe le Mar 26 Juil 2016 - 23:56, édité 1 fois
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