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Le scepticisme et l'épicurisme comme eudémonologies ?

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5 participants

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Baschus a écrit:
en quoi l'on voit les similitudes et les différences avec les stoïciens, qui visent le même but, mais avec d'autres moyens.

Pourtant à la lecture de ce que vous avez dit, j'ai cru retrouver les stoïciens, notamment dans ces phrases :
les choses extérieures ne modifient pas son état
il n'attache aucune importance aux évènements

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Euterpe a écrit:
Soyez précis. La méthode cartésienne serait exactement la même que celle les sceptiques ? A quoi bon affirmer que cette méthode constitue une révolution dans l'histoire de la pensée philosophique, si les sceptiques sont les prédécesseurs de Descartes ? Quelque chose m'échappe, dans ce que vous dites.

La nouveauté vient de la façon dont le doute est employé, à savoir, pour Descartes, en vue de légitimer la science, ce que ne visaient pas du tout les sceptiques. La révolution cartésienne vient d'ailleurs peut-être plutôt de l'invention du cogito. La méthode du doute proprement dite est fort vieille, et Descartes en a conscience ; voici ce qu'il écrit dans ses réponses aux secondes objections :
Descartes a écrit:
C'est pourquoi, ne sachant rien de plus utile pour parvenir à une ferme et assurée connaissance des choses, que si, auparavant que de rien établir, on s'accoutume à douter de tout et principalement des choses corporelles, encore que j'eusse vu il y a longtemps plusieurs livres écrits par les sceptiques et académiciens touchant cette matière, et que ce ne fût pas sans quelque dégoût que je remâchais une viande si commune, je n'ai pu toutefois me dispenser de lui donner une Méditation tout entière.


Euterpe a écrit:
Indifférence, impassibilité, ataraxie, bonheur. C'est là le seul lien que vous nous donnez. La virgule ne réussit pourtant pas à opérer le lien en question. Et pour cause. Où est le lien entre ces quatre substantifs ? Bref, la question reste posée. Comment passez-vous de l'indifférence pyrrhonienne au bonheur ?

C'est difficile d'en dire plus, puisque le bonheur, je crois, pour tous les philosophes de la période hellénistique, se définit de manière négative, et donc comme absence de troubles, comme impassibilité, comme ataraxie. L'indifférence, trouvant sa source dans l'impossibilité de connaître réellement les choses de ce monde, est le moyen sceptique pour arriver à cet état, de même que le contrôle et la sélection des désirs est le moyen épicurien pour arriver à cet état. Schopenhauer a écrit de belles lignes sur ce sujet : il comparait notamment le bonheur négatif à la santé : la satisfaction de l'un comme de l'autre n'est pas éprouvée directement, mais par comparaison avec ce qui est positif, à savoir le malheur ou la douleur, la maladie. Jules Renard exprime en un aphorisme bien taillé la même idée : "On n'est pas heureux : notre bonheur, c'est le silence du malheur."

Euterpe a écrit:
Les poètes et les historiens anciens étaient tout aussi minoritaires que les philosophes. Ils ne sont guère plus représentatifs. Pierre Louÿs adresse une critique de bourgeois (un peu) libéré à la bourgeoisie de son temps, qui avait quelques difficultés à faire la synthèse entre ses racines chrétiennes et sa tête occupée à ses humanités antiques. Louÿs voudrait que les philosophes et moralistes antiques fussent les prototypes de l'éducateur chrétien.

Il y a une différence notable entre les philosophes et les autres écrivains : en effet, les historiens et les poètes, dans leurs écrits, parlent de l'ensemble des anciens, à travers les différentes figures qu'ils pouvaient prendre à cette époque. Si les philosophes anciens parlaient de leurs compatriotes, c'était bien souvent en des termes condescendants. Chez Hérodote, chez Thucydide, l'on voit la réalité de la vie commune des Grecs ; dans les poèmes anacréontiques, ce qui est encore plus intéressant, l'on voit quelles étaient les valeurs qui étaient célébrées au quotidien par les Grecs.

Aristippe de cyrène a écrit:
Pourtant à la lecture de ce que vous avez dit, j'ai cru retrouver les stoïciens, notamment dans ces phrases :

Oui, c'est pourquoi j'ai aussi parlé de similitudes. Pour atteindre l'ataraxie, le stoïcien va miser sur le λόγος (logos) naturel des hommes et sur le pouvoir que nous donne le λόγος de faire preuve de discernement (διακρινεῖν) à l'égard de nos représentations des choses : il faut concentrer son attention non pas sur les choses (τὰ πράγματα) mais nos évaluations sur les choses (τὰ δόγματα). Je suis désolé pour le grec, mais c'est assurément le meilleur moyen pour être précis et de ne pas déformer les concepts des auteurs anciens.

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Baschus a écrit:
C'est difficile d'en dire plus, puisque le bonheur, je crois, pour tous les philosophes de la période hellénistique, se définit de manière négative, et donc comme absence de troubles, comme impassibilité, comme ataraxie. L'indifférence, trouvant sa source dans l'impossibilité de connaître réellement les choses de ce monde, est le moyen sceptique pour arriver à cet état, de même que le contrôle et la sélection des désirs est le moyen épicurien pour arriver à cet état.
Je note que vous n'assimilez plus indifférence et bonheur, et que l'indifférence est bien un moyen en vue d'accéder, moins au bonheur qu'à l'absence (relative) de souffrance(s). Ce qui me permet de préciser ou de rappeler que, du côté des épicuriens, la sélection des désirs ne consiste pas à les abolir, ni par conséquent à devenir insensible. L'impassibilité des uns ou des autres, de toute façon, est une affectation plutôt qu'un état réel. Il s'agit d'être conséquent avec le scepticisme : si je ne peux rien affirmer de rien, l'acatalepsie implique de n'accorder aucun crédit, non seulement à ce qui m'affecte, mais à l'affect lui-même. Mais l'affaire est intellectuelle. Diogène prétend même que, d'après Pyrrhon, les femmes font exception à la règle de l'indifférence. C'est dire (pauvre Philista !). Les Grecs ont toujours eu un problème avec les femmes.

Baschus a écrit:
Jules Renard exprime en un aphorisme bien taillé la même idée : "On n'est pas heureux : notre bonheur, c'est le silence du malheur."
Il faut n'avoir pas connu le bonheur pour affirmer encore et toujours ce poncif, qui consiste à affirmer quelque chose de quelque chose qu'on ne connaît pas, puisqu'on prétend ne le connaître que par l'absence d'autre chose.

Baschus a écrit:
Si les philosophes anciens parlaient de leurs compatriotes, c'était bien souvent en des termes condescendants. Chez Hérodote, chez Thucydide, l'on voit la réalité de la vie commune des Grecs ; dans les poèmes anacréontiques, ce qui est encore plus intéressant, l'on voit quelles étaient les valeurs qui étaient célébrées au quotidien par les Grecs.
On trouve bien des renseignements sur la vie des Grecs dans Platon, qu'il soit condescendant ou pas. Les Lois, par exemple, abondent en indications précieuses.

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Euterpe a écrit:
Ce qui me permet de préciser ou de rappeler que, du côté des épicuriens, la sélection des désirs ne consiste pas à les abolir, ni par conséquent à devenir insensible.

Oui, mais dans l'épicurisme originel il faut admettre que la sélection est drastique : dans le jardin d'Épicure, c'est un peu de pain, un peu d'eau, et au lit !

Euterpe a écrit:
Diogène prétend même que, d'après Pyrrhon, les femmes font exception à la règle de l'indifférence. C'est dire (pauvre Philista !). Les Grecs ont toujours eu un problème avec les femmes.

Je ne connaissais pas ce détail de la doctrine ; grâce à vous, je dois l'avouer, Pyrrhon m'est encore plus sympathique qu'auparavant ! J'ai toujours trouvé un côté comique chez les pyrrhoniens : j'avais lu des anecdotes à leurs sujets qui m'avaient beaucoup fait rire. Et, indépendamment du problème grec, je trouve que les philosophes ont presque toujours des rapports très compliqués avec les femmes. Il n'y a rien de plus passionnant, par exemple, que les rapports de Jean-Jacques ou de Nietzsche avec elles.

Euterpe a écrit:
On trouve bien des renseignements sur la vie des Grecs dans Platon, qu'il soit condescendant ou pas. Les Lois, par exemple, abondent en indications précieuses.

Il est vrai que l'œuvre de Platon est un trésor pour l'étude des mœurs grecques. Lire le Banquet, ce n'est pas que suivre une investigation philosophique sur l'amour, c'est aussi découvrir comment l'on aimait au temps des Grecs. Ceci dit, je crois qu'il y a vraiment une assez forte rupture qui se fait avec les philosophes hellénistiques, qui incarnent un idéal ascétique, un rigorisme strict quelque peu rigide et décadent ; Platon et Aristote, eux, incarnaient encore l'énergie mature de la belle et forte Grèce du Vème siècle.

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Baschus a écrit:
Euterpe a écrit:
Ce qui me permet de préciser ou de rappeler que, du côté des épicuriens, la sélection des désirs ne consiste pas à les abolir, ni par conséquent à devenir insensible.

Oui, mais dans l'épicurisme originel il faut admettre que la sélection est drastique : dans le jardin d'Épicure, c'est un peu de pain, un peu d'eau, et au lit !

C'est plus doux. Le principe est de ne pas abuser des plaisirs afin qu'ils ne nous rendent pas malades, et donc malheureux. Aujourd'hui, nous dirions qu'ils étaient "hédonistes".
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